- AMÉRIQUE - Géologie
- AMÉRIQUE - GéologieL’Amérique – ou, pour être plus précis, les Amériques – est constituée de trois ensembles présentant des différences marquées, tant dans leurs structures, héritées du passé géologique (fig. 1 et hors-texte, pl. XII à XVI), que dans leurs géodynamiques actuelles (fig. 2): l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud sont clairement individualisées comme continents; l’Amérique centrale et le domaine caraïbe, beaucoup plus complexes, font la liaison entre les deux continents, soit par une bretelle continue au niveau de l’Amérique centrale – dont la partie la plus étroite est l’isthme de Panamá –, soit par un complexe d’archipels discontinus au niveau du domaine caraïbe – dont l’arc insulaire des Petites Antilles est le plus dispersé.1. Caractères générauxIndividualité et unité du continent américainAu sens géologique, l’individualité et l’unité du continent américain sont relativement récentes. En effet, à la fin des temps carbonifères, il y a 280 millions d’années (million d’années: Ma), les deux Amériques étaient partie intégrante de la Pangée, qui rassemblait la totalité des continents, par opposition à la Panthalassa, qui formait un domaine océanique unique autour du futur océan Pacifique: ni l’océan Atlantique ni l’océan Indien n’existaient alors, non plus que la Téthys, océan aujourd’hui disparu: ces océans ne naîtront qu’au cours du Secondaire (cf. fig. 1 de chaînes ALPINES).La première rupture dans la Pangée devait séparer deux ensembles continentaux: le Gondwana , au sud, rassemblant les futures Amériques du Sud, Antarctide, Afrique, Arabie, Madagascar, Inde et Australie [cf. GONDWANA]; la Laurasia , au nord, rassemblant les futures Amérique du Nord et Eurasie. Cette séparation se fit à l’occasion du développement de la Téthys , nouvel océan qui naquit à partir du Pacifique occidental et s’ouvrit progressivement en ciseaux vers l’ouest au travers de la Pangée [cf. TÉTHYS], atteignant le domaine de la future Europe méridionale au Trias (il y a 240 Ma environ), le domaine du futur Atlantique central à la limite Trias-Lias (vers 200 Ma) et le futur domaine caraïbe à la limite Jurassique moyen-Jurassique supérieur (vers 160 Ma), pour enfin déboucher dans le Pacifique oriental à la fin du Jurassique (vers 140 Ma, fig. 3 a). À ce stade, l’Amérique du Sud restait partie intégrante du Gondwana, et l’Amérique du Nord partie intégrante de la Laurasia, tandis que le golfe le plus occidental de la Téthys annonçait le domaine caraïbe, qui s’individualiserait complètement au cours du Crétacé.L’indépendance des deux Amériques, du Sud et du Nord, par rapport à l’Afrique et à l’Europe allait naître avec l’océan Atlantique au cours du Crétacé et du Tertiaire (fig. 3b). Cette indépendance apparaît au Crétacé inférieur pour l’Amérique du Sud, avec l’individualisation d’un rift continental entre Afrique et Amérique du Sud pendant le Jurassique et le Crétacé inférieur, rift qui est envahi timidement par la mer après que des formations d’évaporites (gypse, sels) se soient développées à la fin du Crétacé inférieur, les premiers dépôts franchement marins, tant au Gabon qu’au nord-est du Brésil, remontant à l’Aptien (110 Ma environ). L’Amérique du Nord se sépare progressivement de l’Eurasie au cours du Crétacé supérieur et de l’Éocène, pour s’en détacher complètement à la fin de l’Éocène (35 Ma environ). Cette histoire correspond à une nouvelle ouverture en ciseaux, du sud vers le nord, qui succède à celle de la Téthys, de l’est vers l’ouest, en lui étant superposée à l’emporte-pièce. Il y eut donc une époque – le Crétacé supérieur – au cours de laquelle l’Amérique du Sud était indépendante des autres continents, alors que l’Amérique du Nord était toujours rattachée à l’Eurasie. Le domaine caraïbe, quant à lui, n’acquit son indépendance qu’avec l’ouverture de l’Atlantique central, au milieu du Crétacé (100 Ma environ).Indépendantes des continents dont elles se séparaient progressivement, les deux Amériques n’ont été mises en relation qu’ultérieurement: pour la première fois, semble-t-il, au milieu du Crétacé ou légèrement plus tard (vers 80 Ma?), à la suite d’une orogenèse importante sur la façade septentrionale de l’Amérique du Sud; pour la deuxième fois, certainement à la fin du Crétacé supérieur (vers 65 Ma), à la suite d’vne orogenèse importante sur les marges nord et sud du domaine caraïbe; pour la troisième fois, enfin, à la limite Miocène-Pliocène (vers 5 Ma), moment où devait se compléter la bretelle volcanique de l’isthme de Panamá.Ainsi doit-on avoir présent à l’esprit que les deux Amériques ont eu une histoire relativement indépendante et que ce qu’elles ont en commun tient au fait, d’une part, qu’elles n’ont pas cessé de faire face au Pacifique, d’autre part, qu’elles ont été séparées des autres continents par l’ouverture de l’Atlantique; le domaine caraïbe, quant à lui, les sépara pendant l’histoire téthysienne, et les rapprocha pendant l’histoire postérieure. En quelque sorte, les deux Amériques ne se sont séparées de la Pangée que pour se rencontrer après une histoire tectonique complexe.Relations entre Amérique du Nord et Amérique du SudLes deux Amériques ne présentent donc pas d’affinité entre elles au niveau de leur constitution originelle. Les boucliers précambriens (plus de 600 Ma) qui leur servent de «noyau» – bouclier canadien (ou laurentien) pour l’Amérique du Nord, boucliers guyanais, brésilien et patagon pour l’Amérique du Sud – ont des histoires différentes: leurs affinités sont avec leurs équivalents de l’Ancien Monde, Eurasie et Afrique (fig. 4). Il en va de même du Paléozoïque (jusqu’à 240 Ma): pour l’Amérique du Nord, la chaîne calédonienne des Allegheny se poursuit au long du Groenland, en symétrie de la chaîne calédonienne d’Europe du Nord-Ouest (chaînes érigées entre 440 et 400 Ma environ, fig. 5), et la chaîne hercynienne des Appalaches se poursuit dans la chaîne hercynienne d’Europe de l’Ouest (chaînes érigées entre 360 et 280 Ma, fig. 5); pour l’Amérique du Sud, la chaîne hercynienne des sierras de la province de Buenos Aires se poursuit dans la chaîne du Cap, en Afrique du Sud, et l’on doit rechercher le prolongement des Mauritanides de l’Afrique du Nord-Ouest dans les terrains primaires des confins de la Colombie et du Venezuela.C’est seulement avec leur évolution secondaire et tertiaire que les Amériques acquièrent une certaine unité. Encore celle-ci est-elle en partie apparente: les évolutions triasiques et jurassiques de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud (jusque vers 140 Ma) sont comparables dans la mesure où ces deux continents étaient l’un et l’autre en bordure du Pacifique sans pour autant avoir de relation mutuelle; ce n’est qu’ensuite, au cours du Crétacé (à partir de 100 Ma environ) et, surtout, au Tertiaire, que les cordillères américaines du Nord et du Sud auront des relations plus évidentes, encore que l’histoire du domaine caraïbe et de l’Amérique centrale – qui mettent en relation les deux Amériques – soit particulièrement complexe et amène à nuancer ce propos.Histoire des Amériques individualiséesL’histoire des Amériques en tant que telles – c’est-à-dire leur histoire récente au cours des ères secondaire et tertiaire (depuis moins de 180 Ma) – est donc commandée par leurs relations avec les océans Atlantique et Pacifique.Les relations avec l’AtlantiqueLes relations avec l’Atlantique dissimulent une double histoire: celle de l’ouverture de la Téthys et celle de l’ouverture de l’Atlantique.L’ouverture de la Téthys , achevée il y a 140 millions d’années, a séparé les continents du Gondwana et de la Laurasia, dont l’Amérique du Sud et l’Amérique du Nord restaient respectivement parties intégrantes. C’est cette histoire qui détermine une première fois un domaine caraïbe jurassique, d’où vont naître des chaînes dont la logique et la structure sont celles de chaînes alpines: l’Amérique caraïbe est une Amérique alpine (fig. 3 a).L’ouverture de l’Atlantique , encore en cours, a donné leur indépendance aux Amériques. C’est cette histoire qui isole pour la seconde fois, il y a 100 millions d’années environ, un domaine caraïbe, indépendant du reste de la Téthys, et qui fait que l’Amérique caraïbe présente des traits originaux par rapport au reste du domaine alpin.À l’extrême sud des Amériques, entre l’Amérique du Sud et l’Antarctique, la mer de la Scotia a la même signification que la mer des Caraïbes, et les archipels qui l’entourent la même signification que les Antilles ; depuis les travaux du géologue autrichien Eduard Suess (1831-1914), elles sont d’ailleurs comprises comme des «Antilles australes».Les relations avec le PacifiqueOriginelles, et remontant au moins au Paléozoïque, alors que les Amériques représentaient la façade occidentale (dans les coordonnées géographiques actuelles) de ce qui allait devenir la Pangée (cf. fig. 1 de chaînes ALPINES), les relations avec le Pacifique se sont poursuivies au cours du Secondaire et du Tertiaire, alors que les deux Amériques amorçaient puis suivaient une histoire indépendante de celle des autres continents (fig. 3 a et b).Les faits les plus marquants sont liés aux deux étapes successives de l’histoire du Pacifique (cf. océan PACIFIQUE).Lorsque les plaques océaniques de Kula et de Farallon se séparaient de part et d’autre d’une dorsale médio-océanique de direction sublatitudinale – en quelque sorte, au début du moins, dans le prolongement de la Téthys –, les mouvements le long de la façade occidentale des deux Amériques avaient une composante longitudinale marquée. À partir du moment où la ride est-pacifique prit sa position actuelle subméridienne (vers 40 Ma), sa caractéristique principale fut son obliquité par rapport aux deux Amériques. La subduction était alors permanente au long de l’Amérique du Sud, avec trois secteurs différents correspondant aux plaques Antarctique, de Nazca, et des Cocos, limitées par la ride du Chili méridional et la ride de Carnegie.Quand la totalité du Pacifique oriental fut subductée sous l’Amérique du Nord, la ride est-pacifique rencontra la marge du continent américain et s’engagea dans celle-ci vers la limite Miocène-Pliocène, il y a 5 millions d’années environ. Aussi l’Amérique du Nord actuelle a-t-elle une situation très particulière: la subduction s’interrompt à l’extrémité septentrionale de la fosse d’Acapulco pour passer vers le nord à l’ouverture du golfe de Californie, dans le prolongement du rift est-pacifique, puis au secteur transformant de la faille de San Andreas, jusqu’au cap Mendocino, au-delà duquel réapparaît, très près de la côte, la ride de Juan de Fuca, équivalente de la ride est-pacifique; la faille de la Reine-Charlotte – à valeur de faille transformante – interrompt définitivement celle-ci jusqu’à l’Alaska, où la subduction reprend dans la fosse des Aléoutiennes. Il en résulte une grande différence entre les bordures pacifiques de l’Amérique du Sud et de l’Amérique du Nord.L’Amérique du Sud est continuellement frangée par la cordillère des Andes (cf. cordillère des ANDES et chaîne ANDINE) qui, certes, change de nature – par exemple, la partie médiane des Andes est dépourvue d’ophiolites tandis que ses parties septentrionale et australe en sont riches –, mais qui coexiste partout avec la zone de subduction, la fosse océanique et la géodynamique associée (séismes superficiels à profonds et volcans actifs).L’Amérique du Nord est, au contraire, formée de secteurs différents en marge du Pacifique.Trois secteurs correspondent à une subduction active: au sud, au long des côtes du Mexique méridional et de l’Amérique centrale (fosse d’Amérique centrale); au nord, au long des côtes des États d’Oregon et de Washington (fosse d’Oregon); à l’extrême nord, au long des côtes d’Alaska (fosse des Aléoutiennes); partout, on retrouve, dans des cordillères bien organisées, volcans actifs et séismes superficiels à profonds aux foyers disposés selon un plan (de Wadati-Benioff) plongeant sous le continent nord-américain.Deux autres secteurs sont transformants: au nord, celui de la Reine-Charlotte, au large du Canada, au sud, celui de San Andreas, en Californie, qui entame le bord du continent nord-américain; tous deux sont dépourvus de volcanisme actif et les séismes, superficiels, y sont liés aux coulissages le long de failles dont la plus célèbre est celle de San Andreas.Un dernier secteur correspond à une zone d’ouverture océanique au niveau du golfe de Californie (mer de Cortés); les séismes – superficiels, semblables à ceux qu’on rencontre au voisinage des rifts médio-océaniques – ne se produisent que dans l’axe du golfe, où s’épanchent des volcans basaltiques sous-marins qui ne constituent qu’exceptionnellement des îles.À l’activité de ces différents secteurs s’ajoute une tectonique extensive, dite du Basin and Range , si caractéristique de l’ouest des États-Unis et du nord-ouest du Mexique, qui élargit considérablement le domaine montagneux et dont l’origine est souvent attribuée à la subduction de la ride est-pacifique sous la marge du continent nord-américain avant qu’elle ne se stabilise dans sa position actuelle au niveau du golfe de Californie. Mais on considère aussi que cette extension peut être liée à un «point chaud» dont la région de Yellowstone (hors-texte, pl. XII) serait l’émergence actuelle. Quoi qu’il en soit, la belle homogénéité de la cordillère des Andes d’Amérique du Sud ne se retrouve pas en Amérique du Nord.Délimitation des AmériquesLes limites des Amériques entre elles et par rapport aux autres continents ne sont pas toujours aussi claires qu’on pourrait l’imaginer.Si l’Amérique du Sud est nettement détachée de l’Afrique, il n’en va pas de même de l’Amérique du Nord, qui reste rattachée à l’Eurasie par le plateau continental du détroit de Béring, dont on connaît le rôle dans le peuplement humain des Amériques à partir de l’Asie, alors qu’il était émergé lors de la dernière régression glaciaire: il n’existe pas de limite structurale entre l’Alaska et la Sibérie orientale. Aussi, si l’on considère les mouvements des plaques au cours des temps secondaire et tertiaire, la limite entre Amérique du Nord et Eurasie doit être recherchée à l’ouest du détroit de Béring, d’autant plus que l’Amérique du Nord est restée reliée à l’Eurasie par l’Est, du côté atlantique, jusqu’à la fin de l’Éocène: la cicatrice ophiolitique qui court du Japon septentrional (île de Hokkaid 拏) à l’île de Sakhaline et en Sibérie orientale – où elle est encore mal connue – est probablement la véritable limite entre l’Eurasie et les Amériques.L’Amérique du Nord se poursuit vers le sud jusqu’au Mexique inclus: la limite est marquée par la «transversale» de Polochic-Motagua (fig. 1 et hors-texte, pl. XVI), qui est une zone de failles décrochantes senestres actuellement actives – on lui doit les plus grands séismes destructeurs de l’Amérique centrale; encore que la plate-forme du Honduras puisse être considérée comme le dernier témoin de l’Amérique du Nord ayant coulissé vers l’est le long de cette transversale.Le domaine caraïbe a pour frontières actuelles (hors-texte, pl. XVI): au nord, la transversale de Polochic-Motagua, qui passe vers l’est au système transformant de la faille de Swan, puis à la ride des Caïmans, enfin, au système transformant de la faille de Bartlett-Oriente, qui aboutit à la fosse de Porto Rico; au sud, le système des failles d’Oca-El Pilar, qui entame la partie septentrionale de l’Amérique du Sud. L’ensemble de ces différents systèmes permet un mouvement relatif vers l’est (2 cm/an environ) de la plaque Caraïbes par rapport aux plaques Amérique du Nord et Amérique du Sud.Il n’en fut pas exactement ainsi dans le passé. Au nord, par exemple, la frontière à la fin du Crétacé supérieur (65 Ma) épousait à peu près la limite actuelle en Amérique centrale (nappes ophiolitiques au nord du Guatemala), mais dépassait de loin celle-ci vers le nord, à Cuba, où se trouve le front des nappes ophiolitiques mises en place à la fin du Crétacé. Vers le sud, la question se pose d’une relation entre les nappes caraïbes du Venezuela et les nappes ophiolitiques de la partie occidentale de la Colombie, par conséquent d’une limite plus méridionale du domaine caraïbe.Cela pose d’ailleurs la question de l’origine du domaine caraïbe, dont l’histoire est triple: téthysienne pour ce qui concerne le Jurassique, liée au Pacifique pendant le Crétacé inférieur, autonome depuis le Crétacé supérieur.À cela est lié le problème des limites orientale et occidentale du domaine caraïbe, marquées par deux zones de subduction, celle d’Amérique centrale, à l’ouest, qui appartient à la famille des subductions pacifiques, et celle des Petites Antilles, à l’est, dont l’origine se situe dans l’océan Atlantique, à l’instar de l’arc insulaire des Sandwich du Sud (ou arc de la Scotia), dans l’Atlantique austral. Si toutes deux sont récentes dans leurs positions actuelles, elles succèdent peut-être à des subductions anciennes: aussi ancienne que les autres subductions pacifiques (Trias?, Jurassique au moins) pour la fosse d’Amérique centrale; plus ancienne qu’on ne l’a cru (Éocène) pour les Petites Antilles, où des formations volcaniques du Crétacé inférieur (de 150 à 130 Ma) et du Crétacé supérieur (de 70 à 80 Ma) ont été récemment datées dans les îles de la Désirade et des Grenadines, respectivement.L’Amérique du Sud est limitée vers le nord par la zone de failles dextres d’Oca-El Pilar, active de nos jours: les sierras de Santa Marta, de Pejirà et de Mérida, au nord de la Colombie, sont les derniers affleurements septentrionaux certains du socle sud-américain.Vers le sud, l’Amérique du Sud est reliée au continent Antarctique par la cordillère de la Scotia qui, par les îles Géorgie du Sud, Sandwich du Sud, Orcades du Sud et Shetland du Sud, forme un cadre continental autour de la mer de la Scotia. Cette dernière comporte plusieurs bassins océaniques dont le plus oriental est en ouverture active (depuis environ 7 Ma) en arrière de l’arc des Sandwich du Sud. Le domaine de la Scotia est comparable au domaine caraïbe: ses frontières actuelles nord et sud sont de grands décrochements parfois accompagnés de chevauchements; à l’est, la subduction de l’Atlantique austral sous l’arc volcanique actif des Sandwich du Sud rappelle le dispositif des Petites Antilles. Cependant, la frontière occidentale n’est pas équivalente; il s’agit surtout d’une zone de fracture complexe (fracture Shackleton) à convergence nord-est - sud-ouest, différente de la subduction typique de l’Amérique centrale.Situation géodynamique actuelleLa situation géodynamique actuelle des Amériques correspond: d’une part, à une façade pacifique en subduction (marges actives), à l’exception des secteurs californien (Californie et Basse-Californie) et canadien, ce que souligne la répartition du volcanisme actif et des séismes; d’autre part, à une façade atlantique héritée de l’extension dont est né cet océan, aujourd’hui stable (marges passives), sauf dans les régions de l’arc des Antilles et de l’arc des Sandwich du Sud (ou de la Scotia), qui sont les deux seuls secteurs où l’Atlantique soit en subduction.L’ensemble du dispositif correspond à une avancée différentielle de l’Amérique du Nord vers l’ouest par rapport à l’Amérique du Sud et par rapport au domaine caraïbe, lequel, dans son ensemble, est décalé vers l’est par rapport aux deux Amériques. Le domaine caraïbe présente d’ailleurs la particularité d’être encadré par deux zones de subduction de sens contraires, celle d’Amérique centrale et celle des Antilles, ce qui forme un dispositif relativement rare qu’on ne retrouve que dans quelques secteurs du Pacifique occidental, dans des contextes géodynamiques d’ailleurs différents.2. L’Amérique du NordMalgré sa complexité, le continent nord-américain présente un nombre réduit de grands éléments morpho-structuraux (fig. 1 et hors-texte, pl. XII): le bouclier canadien, la plate-forme nord-américaine, les chaînes de montagnes ourlant les bordures continentales.Le bouclier canadien , d’âge précambrien (plus de 570 Ma, jusqu’à 3 800 Ma), occupe la partie située au nord de la ceinture des Grands Lacs et se poursuit vers l’est dans la partie méridionale des îles arctiques et au Groenland.La plate-forme nord-américaine , formée par la partie du bouclier recouverte par une série sédimentaire allant de l’ère primaire à l’Actuel (depuis 570 Ma) et demeurée horizontale, se poursuit au nord dans la partie septentrionale des îles arctiques. Le rebord de la plate-forme qui domine morphologiquement le bouclier est appelé ligne de Glint ; les grands lacs du retrait glaciaire d’il y a 10 000 ans la jalonnent: lacs Supérieur, Ontario, Érié, Huron, Michigan, Winnipeg, Caribou, Grand Lac de l’Esclave, Grand Lac de l’Ours.À l’est, les chaînes appalachiennes de la façade atlantique et du pourtour du golfe du Mexique, mises en place durant l’ère primaire (de 570 à 225 Ma), ont vu leur continuité initiale interrompue du fait des ouvertures ultérieures de la mer de Baffin, de l’Atlantique et du golfe du Mexique, accompagnées de dépôts secondaires et tertiaires transgressifs et discordants le long des marges nouvellement créées. Ainsi en est-il de la plaine côtière du golfe du Mexique , qui masque les relations structurales initiales entre les Appalaches, les monts Ouachita et les monts Marathon.À l’ouest, les cordillères nord-américaines , édifiées sur et en bordure de la marge pacifique du continent au cours des temps alpins, c’est-à-dire depuis le début de l’ère secondaire (225 Ma), se suivent de manière ininterrompue de l’Alaska à l’Amérique centrale nucléaire (à socle continental), et plus précisément jusqu’au Nicaragua. Au-delà, le relais montagneux avec la cordillère des Andes se fait par l’Amérique centrale isthmique du Costa Rica et de Panamá, dépourvue de croûte continentale.Les trois grands éléments constitutifs du continent nord-américain résultent d’événements géodynamiques qui se sont succédé dans le temps en se recoupant les uns les autres. Par exemple, les chaînes appalachiennes paléozoïques de la façade atlantique sont recoupées orthogonalement et reprises au Mexique par les structures des cordillères secondaires et tertiaires.On distingue ainsi, en suivant l’histoire géologique, une Amérique du Nord précambrienne, une Amérique du Nord primaire et une Amérique du Nord secondaire et tertiaire.L’Amérique du Nord précambrienneLe bouclier canadien couvre une superficie de 4 850 000 kilomètres carrés sur le continent et les îles arctiques. Dans le Précambrien, on distingue l’Archéen, antérieur à 2 milliards 500 millions d’années, fait de roches fortement métamorphisées, et le Protérozoïque, moins déformé, qui se termine vers 570 millions d’années (cf. tableau).Les datations isotopiques permettent de différencier des provinces structurales dans lesquelles les roches ont été métamorphisées ou granitisées à la même époque (fig. 6 et hors-texte, pl. XII).L’ArchéenLes plus anciennes provinces sont celles du lac Supérieur, du Grand Lac de l’Esclave, du lac du Nain et du Wyoming (cette dernière ayant été reprise par les déformations laramiennes à 65 Ma), où les manifestations magmatiques et métamorphiques les plus récentes datent de 2 milliards 500 millions d’années (fig. 6).La base de l’Archéen est bien exprimée près du lac Supérieur, où affleurent les séries de Keewatin , constituées par de puissantes venues volcaniques renfermant des structures en oreiller (pillow lavas ) associées à des cherts, à des grauwackes, à des conglomérats et à un niveau ferrifère; l’ensemble de ces séries peut dépasser 8 000 mètres d’épaisseur. De nombreux chercheurs ont suggéré que ces greenstones belts pouvaient constituer d’anciennes dorsales océaniques ou d’anciens arcs insulaires. La plus large et la plus continue de ces ceintures est celle d’Abitibi.Au-dessus des séries de Keewatin et en légère discordance angulaire apparaissent les sédiments du Témiscamien , qui comprennent des grauwackes, des ardoises, des conglomérats et quelques niveaux carbonatés. Ces sédiments ont été plissés, métamorphisés et granitisés durant l’orogenèse kénoranienne (de 2 700 à 2 500 Ma), attribuée par certains géologues à des collisions de types inter-arcs insulaires ou arcs insulaires-continents.Le ProtérozoïqueLe Protérozoïque repose en discordance sur l’Archéen. On y distingue trois grandes orogenèses séparées par les discordances qui ont permis une division du Protérozoïque canadien en Aphébien, Hélikien et Hadrynien (cf. tableau).Le Protérozoïque inférieur (Aphébien ) est bien représenté dans les provinces de Churchill et de l’Ours. Les roches volcaniques et les sédiments sont accumulés dans des géosynclinaux ou dans des bassins de type intracratonique limités par des failles et considérés comme des rifts avortés encore appelés aulacogènes. Le minerai de fer et les stromatolites sont particulièrement abondants à cette époque. La déformation et le métamorphisme de ces roches lors de l’orogenèse hudsonienne (1 750 Ma) ont engendré des structures qui forment un grand arc concave autour de la baie d’Hudson, de la fosse du Labrador à la ceinture du Cape Smith. La présence d’ophiolites y pose le problème de l’existence d’une tectonique des plaques dès cette époque.Le Protérozoïque moyen (Hélikien ) est représenté de façon très variable dans le sud du Québec et au Groenland, où on le connaît par la présence d’anorthosites et de charnockites liées à l’orogenèse elsonienne (1 400 Ma). À l’est des cordillères, il est caractérisé, sur le plateau du Colorado, par la séquence du Grand Canyon, discordante sur des schistes archéens; plus au nord, dans le domaine cordillérain du nord-ouest des États-Unis et du Canada, il constitue l’épaisse pile volcano-sédimentaire du supergroupe Belt-Purcell, qui correspondrait au début de l’ouverture océanique initiatrice de la marge ouest-américaine, bien caractérisée au Paléozoïque. Au nord-est de la plate-forme canadienne, d’épaisses séries sédimentaires sont accumulées dans de vastes bassins peu déformés (bassins d’Athabasca, de Thelon...).À l’est, la province de Grenville est intensément déformée. On y distingue à la base la série de Grenville – qui comprend des marbres, des quartzites, des roches volcaniques et des gneiss –, surmontée en discordance par la série de Hastings . L’ensemble a été structuré et métamorphisé lors de l’orogenèse grenvillienne (1 000 Ma).Le front grenvillien sépare ces séries des roches plus anciennes du bouclier canadien. On le suit sur près de 5 000 kilomètres, à l’avant des chaînes appalachiennes, du Labrador au Mexique. Les nappes engendrées lors de cette orogenèse et le métamorphisme granulitique associé pourraient être la conséquence de la soudure entre la Laurasia et le Gondwana qui a engendré une Pangée primitive autour de 1 milliard d’années.Le Protérozoïque supérieur (Hadrynien ) affleure dans les cordillères, les chaînes appalachiennes et au Groenland. Dans les cordillères, deux lithologies sont remarquables: le «grit», microconglomérat provenant de l’érosion du bouclier canadien, et la «diamictite», conglomérat aux clastes polis et striés, probablement d’origine glaciaire. Dans le nord des chaînes appalachiennes, des couches rouges et des coulées basaltiques témoignent à cette époque d’un début d’ouverture océanique à l’endroit du futur orogène calédonien.Le Protérozoïque supérieur est absent sur le plateau du Colorado. La transgression cambrienne repose directement sur le Protérozoïque moyen. Dans les montagnes Rocheuses canadiennes et la chaîne d’Omineca, située immédiatement à l’ouest, le Protérozoïque supérieur et le Cambrien inférieur sont en continuité stratigraphique ou parfois séparés par une très légère discordance; la base du Cambrien est alors souvent difficile à marquer. Il a fallu recourir à la notion d’Éocambrien ou d’Infracambrien, systèmes de transition dans lesquels on connaît des formations glaciaires. En de nombreux endroits, la limite entre le Protérozoïque et le Cambrien reste floue: ainsi, dans la chaîne d’Omineca, elle se situe à près de 600 mètres sous le niveau à Fallotaspis , Trilobites qui caractérisent classiquement le début du Cambrien.L’Amérique du Nord primaireL’Amérique du Nord primaire regroupe les terrains primaires horizontaux des plaines intérieures, les chaînes appalachiennes, ainsi que des éléments de ces deux ensembles repris dans les cordillères ou isolés au Groenland et dans les îles arctiques (fig. 7 a, b, c, d, et hors-texte, pl. XII).Le Primaire de la plate-forme nord-américaineLa couverture sédimentaire qui surmonte le Précambrien est relativement mince et elle renferme de nombreuses lacunes stratigraphiques. Sa puissance atteint au maximum 3 000 mètres, et cela dans des bassins intérieurs demeurés subsidents. Cette couverture a enregistré de nombreuses transgressions et régressions; trois d’entre elles sont particulièrement importantes.La première grande transgression se produit au Cambrien supérieur (520 Ma environ, fig. 7 a). L’avancée des mers se fait à partir de l’ouest (marge paléopacifique) et du sud-est (marge de l’océan Iapetus, partie d’un véritable proto-Atlantique qui séparait les continents américain et eurafricain). Cette première incursion marine atteint son maximum au Silurien (vers 430 Ma environ, fig. 7 b) tandis que les grands bassins subsidents de Williston, de l’Hudson et du Michigan s’individualisent dès l’Ordovicien (500 Ma). La lacune du Dévonien inférieur (de 410 à 390 Ma) correspond à la régression durant laquelle la partie intérieure du continent était en majorité émergée.La deuxième transgression débute au Dévonien moyen (390 Ma) pour atteindre son apogée au Mississippien inférieur (360 Ma, fig. 7 c), alors que d’épais dépôts deltaïques s’accumulent au pied des chaînes appalachienne, à l’est, de l’Antler, à l’ouest, innuitienne, au nord, toutes en surrection.Après la régression généralisée du Mississippien supérieur-Pennsylvanien inférieur (de 330 à 300 Ma), la troisième grande transgression , du Pennsylvanien moyen (300 Ma), conduit une dernière fois à l’immersion de la plate-forme sous une faible tranche d’eau. C’est l’époque de la formation des grands bassins houillers de l’Est (fig. 7 d).La régression permienne (280 Ma) s’accomplit en direction de l’ouest. La mer se retire au-delà du Mississippi, où elle se signale par des dépôts riches en phosphates (Kaibab-Phosporia Sea ) et les puissantes séries des bassins de l’Oquirrh (Utah) et de la Delaware (Texas et Nouveau-Mexique).Si, dans l’ensemble, la plate-forme intérieure est caractérisée par sa stabilité durant le Paléozoïque, il faut néanmoins signaler la formation de vastes plis de fond exposant à l’érosion des parties de socle, sur des emplacements proches de ceux des actuelles montagnes Rocheuses des États-Unis; ce sont les Ancestral Rockies permiennes (fig. 7 d).Les chaînes appalachiennesAu sens large, «chaînes appalachiennes» désigne les structures et les reliefs grossièrement parallèles, de direction nord-est - sud-ouest, qui accidentent sur 200 à 400 kilomètres de largeur la façade orientale du continent, depuis Terre-Neuve jusqu’au nord de la Floride. Du fait des ouvertures océaniques ultérieures (téthysienne au Jurassique supérieur – de 160 à 140 Ma –, dont le golfe du Mexique conserve la marque; atlantique au Crétacé-Tertiaire – de 110 à 35 Ma), les parties orientales des chaînes appalachiennes ont été soit enfouies sous les dépôts de marge post-triasiques, soit largement séparées: le symétrique des Appalaches se trouve dans les Mauritanides, en Afrique occidentale, alors que le prolongement des zones internes appalachiennes apparaît dans le sud du Mexique, au-delà du golfe du Mexique. Quant aux éléments établissant la liaison entre les Appalaches et les structures paléozoïques du Mexique de même direction (passant donc en travers et en tunnel sous les structures cordilléraines des Sierra Madre occidentale et orientale mexicaines), on les trouve décalés vers le nord-est à la faveur de grands accidents décrochants fini-hercyniens et jurassiques; ce sont les monts Ouachita, dans le sud des États-Unis, et les monts Marathon, près de la frontière du Mexique (fig. 7 d).Les chaînes appalachiennes sont classiquement divisées en deux tronçons, l’un septentrional, l’autre méridional, de part et d’autre d’un grand accident décrochant dextre fini-hercynien – la Kelvin Fault – qui recoupe transversalement l’édifice à la hauteur de New York (hors-texte, pl. XII).Le tronçon septentrional comprend la chaîne taconique, les White et les Green Mountains aux États-Unis (d’une façon générale, la Nouvelle-Angleterre, en une chaîne qu’on appelle souvent Allegheny Range, distincte des Appalaches au sens strict), les Provinces maritimes (Nouveau-Brunswick et Nouvelle-Écosse) et la Gaspésie au Canada. Il se prolonge à Terre-Neuve, où sont accessibles toutes les grandes unités de cette partie des chaînes appalachiennes. On distingue en effet sur cette île, d’ouest en est, c’est-à-dire, en tenant compte du déversement général des structures vers le nord-ouest sur et vers l’avant-pays grenvillien du Labrador, de l’extérieur vers l’intérieur de l’édifice (fig. 8 a):– la Humbert Zone (ou Appalachian Miogeocline ), dans laquelle le socle grenvillien est couvert de roches sédimentaires datées du Précambrien terminal à l’Ordovicien; des lambeaux ophiolitiques issus de zones plus internes la surmontent tectoniquement;– la Dunnage Zone , première zone interne, qui montre, au-dessus d’un soubassement ophiolitique, une association volcano-sédimentaire du Paléozoïque inférieur; cette zone a été charriée sur la Humbert Zone lors de la phase taconique de la fin de l’ordovicien (435 Ma); à son arrière, elle chevauche au contraire vers l’est la Gander Zone , ce «rétrocharriage» étant plus récent (phase acadienne du Dévonien supérieur: 350 Ma);– la Avalon Zone a valeur d’arrière-pays; elle présente en effet, au-dessus des roches du Précambrien, des sédiments cambriens à faune eurafricaine; elle est séparée de la Gander Zone par un décrochement senestre majeur (Dover Fault ).Les traits structuraux de ce tronçon septentrional, dus essentiellement à l’orogenèse calédonienne, aire des deux grandes phases, taconique , à la fin de l’Ordovicien, et acadienne , au Dévonien supérieur, ont été récemment précisés grâce à un profil de sismique réflexion profonde effectué en mer au nord de Terre-Neuve (fig. 8 a). Le caractère largement allochtone des structures taconiques et acadiennes a été confirmé. La flèche du charriage des unités ophiolitiques – issues de l’océan Iapetus qui séparait l’Amérique du Nord de l’Eurafrique – sur l’ancienne marge cambro-ordovicienne est supérieure à 200 kilomètres.Le tronçon méridional comprend les Appalaches proprement dites et les éléments décalés des monts Ouachita, des monts Marathon et du Mexique.C’est dans les Appalaches, en particulier selon la transversale Tennessee-Caroline du Sud – le long de laquelle a été établi l’un des premiers profils de sismique réflexion à écoute longue Cocorp (pour Consortium for Continental Reflection Profiling ) – que la zonéographie de la chaîne est la plus complète (fig. 8 b).Au nord-ouest, le plateau appalachien est constitué de roches sédimentaires primaires peu déformées qui établissent la transition avec les plaines intérieures.Au sud-est vient la Valley and Ridge Province , dont le relief a servi à définir le type appalachien. Cette province est constituée de sédiments déformés et charriés au Permo-Carbonifère vers le nord-ouest sur le plateau qui sert d’avant-pays.Plus à l’est se dresse la Blue Ridge , qui culmine à 2 038 mètres au mont Mitchell. Le socle y affleure au nord tandis qu’il est recouvert au sud par les laves du Catoctin, qui passent localement à des formations détritiques souvent métamorphisées. La Blue Ridge chevauche vers l’ouest la Valley and Ridge Province.La province de Piedmont est la dernière qui soit visible à l’affleurement. Faite de roches sédimentaires, ophiolitiques et volcaniques, plusieurs fois déformées, métamorphisées et granitisées, elle est charriée sur la Blue Ridge. Vers le sud-est, elle s’enfonce sous la plaine côtière atlantique, si bien que son contact avec l’arrière-pays est masqué.L’arrière-pays a été reconnu par des forages en Floride. Il s’agit du Florida Element (P. B. King, 1975), fait d’un socle continental grenvillien supportant une couverture cambro-ordovicienne restée non déformée. Il faut se rendre dans le sud du Mexique, plus précisément dans le bloc d’Oaxaca, pour retrouver le contact majeur entre les zones internes appalachiennes et l’arrière-pays. En effet, dans ce bloc ont été reconnus, de part et d’autre d’une suture taconique majeure (M. Tardy et al., 1986): à l’est, un socle «zapotèque» grenvillien surmonté de témoins d’une couverture sédimentaire cambro-ordovicienne; à l’ouest, un ensemble «mixtèque» constitué de terrains méta-ophiolitiques et métasédimentaires structurés et granitisés pour l’essentiel lors de la phase taconique (vers 425 Ma).On retrouve donc au niveau du tronçon méridional des caractères identiques à ceux qui ont été signalés dans le tronçon septentrional; ces caractères sont liés à l’orogenèse calédonienne, où le rôle de la phase taconique est majeur. Le caractère nouveau se situe dans les zones externes, où seul le tronçon méridional montre des charriages hercyniens. De cette manière, le raccourcissement est majeur dans le tronçon méridional, entre les grands décrochements dextres hercyniens (fig. 7 d), c’est-à-dire dans les Appalaches, les monts Ouachita et les monts Marathon. Les forages pétroliers et, surtout, le profil Cocorp ont montré que le seul charriage des zones internes sur l’ancienne marge est-américaine avait une flèche d’au moins 260 kilomètres (fig. 8 b).D’un point de vue historique, les chaînes appalachiennes, aux très forts raccourcissements, résulteraient de la collision des ensembles nord-américain et eurafricain à partir de l’Ordovicien supérieur (P. Matte, 1986).Cette hypothèse nécessite l’existence d’aires océaniques ouvertes dès le Cambrien entre ces deux continents. C’est ainsi que, en fonction des sutures ophiolitiques reconnues de part et d’autre de l’Atlantique, on reconstitue au Paléozoïque inférieur deux aires océaniques (l’océan Iapetus et l’océan mauritanien) dans l’espace proto-atlantique, entre Amérique du Nord et Eurafrique. Ces aires étaient séparées par le microcontinent intermédiaire Avalon-Floride-Oaxaca. Partant de cette reconstitution, la tectonique taconique (vers 425 Ma), reconnue de Terre-Neuve au Mexique et suivie au Silurien par des épanchements détritiques au pied des premiers reliefs (fig. 7 b), résulterait de la fermeture de l’océan Iapetus par rapprochement et collision du microcontinent intermédiaire avec la marge américaine. La phase acadienne (vers 360 Ma) marquerait un stade plus avancé de cette collision.L’opposition structurale signalée entre les deux tronçons des chaînes appalachiennes se manifeste après la fermeture de l’océan mauritanien au Carbonifère. Le rapprochement entre l’Eurafrique et l’Amérique se poursuivant, un stade d’hypercollision se produit dans le tronçon méridional, entre les décrochements dextres où se forment les charriages frontaux hercyniens (fig. 7 d).Cette différenciation longitudinale dans le système appalachien est le fruit de l’obliquité des chaînes calédonienne (achevée vers 400 Ma) et hercynienne (achevée vers 250 Ma), dont les domaines sont bien séparés en Europe (fig. 5). Si les deux chaînes sont encore distinctes au nord-est de l’Amérique du Nord (sud-est du Canada, nord-est des États-Unis – chaîne des Allegheny, d’histoire principalement calédonienne), elles se recouvrent géographiquement plus au sud: la chaîne appalachienne proprement dite, achevée à l’Hercynien, reprend des structures calédoniennes antérieures qui apparaissent ainsi simplement précoces.Le Paléozoïque des îles arctiques et du GroenlandLe Précambrien des îles arctiques supporte des roches sédimentaires du Paléozoïque inférieur dont l’épaisseur est régulièrement croissante vers le nord. Ces roches ne sont pas déformées dans la partie sud des îles, où elles constituent la plate-forme arctique. En revanche, au centre et au nord, les séries épaissies déposées dans le bassin franklinien (fig. 7 b) sont tectonisées. Leur déformation, commencée au Dévonien, a connu son paroxysme au Carbonifère inférieur (Mississippien inférieur: vers 350 Ma), lors de l’orogenèse ellesmérienne .Le bassin franklinien tectonisé supporte en discordance les séries sédimentaires du Paléozoïque supérieur. Celles-ci sont les premiers dépôts du bassin de Sverdrup (fig. 7 d), dont la subsidence se poursuit jusqu’à l’Éocène.La frange tectonisée du Groenland oriental, outre le socle archéen remobilisé, comprend des formations du Protérozoïque moyen (Hélikien) et du Paléozoïque inférieur, déformées et déversées vers le bouclier. Il s’agit là, dans le prolongement des chaînes appalachiennes, de la partie de l’édifice calédonien (fig. 7 b) séparée de son symétrique scandinave depuis l’ouverture de l’Atlantique nord au Crétacé supérieur-Tertiaire.L’Amérique du Nord secondaire et tertiaireOn attribue au Secondaire et au Tertiaire les terrains des plaines côtières et intérieures ainsi que les domaines tectonisés des régions arctiques et des cordillères occidentales (fig. 7 e, f, g, h, i et hors-texte, pl. XII).Les plainesLes plaines côtières de l’Atlantique et du golfe du Mexique se suivent du New Jersey au Yucatán. Leur genèse est étroitement liée à l’évolution de l’Atlantique et aux transgressions et régressions marines qui se sont succédé depuis le Jurassique.Le premier indice d’une ouverture océanique dans le prolongement ouest de la Téthys se situe au Trias-Jurassique inférieur; il s’agit d’une fracturation du bâti continental avec épanchements de laves basiques et dépôt de formations continentales rouges omniprésentes dans les chaînes appalachiennes (fig. 7 e).L’océanisation est plus tardive. Elle se produit à partir du Jurassique supérieur (150 Ma), alors que le Mexique coulisse vers le sud-est le long d’une faille transformante transcontinentale (linéament de Caltam), permettant la genèse simultanée du golfe du Mexique (fig. 7 f). La croûte océanique de ce golfe est ainsi un des rares témoins de cette «Téthys de la reconquête» (J. Aubouin et al., 1977), ailleurs reprise par l’ouverture de l’Atlantique nord ou par les orogènes alpins.Les limites actuelles des plaines côtières correspondent, aux États-Unis, à l’avancée marine maximale du Crétacé moyen (100 Ma). Cette transgression (fig. 7 g) s’est accomplie sur les chaînes appalachiennes arasées en isolant les monts Ouachita et Marathon. L’évolution générale ultérieure des marges parfois subsidentes (golfe du Mexique) n’est par la suite, en définitive, qu’une régression générale vers les côtes actuelles.La plate-forme nord-américaine a connu dans sa partie occidentale plusieurs incursions marines au cours du Mésozoïque. Les deux premières sont d’obédience pacifique; elles se sont produites au Trias (fig. 7 e) et au Jurassique supérieur (fig. 7 f).La transgression majeure du Crétacé supérieur intéresse la partie de la plate-forme située au pied des premiers reliefs des cordillères en cours de formation. Dans le long bras de mer allant du Mexique aux monts Mackenzie (dans le nord-ouest du Canada), les dépôts sont terrigènes. Ils renferment, entre autres, les grands gisements de houille de l’ouest des États-Unis (fig. 7 g).Le bassin de SverdrupDans les îles arctiques, le dépôt des séries puissantes (13 000 m) du bassin du Sverdrup se poursuit durant le Secondaire et le Tertiaire. L’orogenèse Eureka engendre, de l’Éocène moyen (45 Ma) au Miocène inférieur (15 Ma), un plissement modéré et interrompt la sédimentation. La mer ne reviendra qu’au cours de la glaciation quaternaire.Les cordillères occidentalesBordant le continent nord-américain du côté de l’océan Pacifique, les cordillères occidentales se suivent depuis l’Alaska jusqu’en Amérique centrale nucléaire, selon une longue ceinture de largeur variable: moins de 100 kilomètres dans sa partie la plus étroite de l’isthme de Tehuantepec, au Mexique, 1 500 kilomètres dans l’ouest des États-Unis (hors-texte, pl. XII). On y distingue, d’est en ouest (fig. 9, 10, 11): un domaine cordillérain résultant de la tectonisation de la bordure de la plate-forme nord-américaine et de la reprise des chaînes appalachiennes au Mexique, un domaine pluto-vulcanique d’arc insulaire mésozoïque, souvent masqué par les volcanites cénozoïques, et un domaine franciscain (de la ville de San Francisco), défini dans le Coast Range de Californie.Le domaine cordillérainC’est dans l’ouest des États-Unis que le domaine cordillérain prend toute son ampleur. Malgré l’extension récente et spectaculaire du Basin and Range, qui individualise la région dite Grand Bassin, on y distingue deux parties principales (hors-texte, pl. XII):– un autochtone cordillérain, où la tectonique compressive laramienne du Paléocène (60 Ma) est à l’origine du chevauchement de vastes panneaux de socle; il s’agit des montagnes Rocheuses des États-Unis qui enserrent le plateau du Colorado, lequel a échappé aux déformations;– un allochtone cordillérain qui, plus à l’ouest, implique les terrains de l’autochtone surmontés de vastes unités charriées vers l’est; le front de cet édifice constitue l’Over-Thrust Belt (fig. 10); du Montana au Nevada, où elles sont interrompues par la Las Vegas Shear Zone (partie du linéament du Texas, cf. infra ), les unités allochtones nées de vastes cisaillements plats dans la plate-forme ont été mises en place du Crétacé supérieur (100 Ma) au Paléocène (60 Ma), selon une polarité clairement établie, d’ouest en est, vers la plate-forme américaine, qui joue le rôle d’avant-pays.Ces deux parties se placent entre deux structures transversales complexes:– le linéament de Lewis and Clark, ou linéament du Montana, au nord, qui sépare les cordillères américaines des cordillères canadiennes, de sorte que les montagnes Rocheuses canadiennes ne sont pas le prolongement des montagnes Rocheuses des États-Unis mais celui de l’Over-Thrust Belt; les deux sont alors parfois réunies en une même Cordilleran Fold and Thrust Belt (S. S. Oriel, 1986);– le linéament du Texas, dit parfois Las Vegas/El Paso Gap , qui longe la partie méridionale du plateau du Colorado et sépare le domaine cordillérain des États-Unis des Sierra Madre orientale et occidentale mexicaines.Au Canada , le domaine cordillérain, plus étroit, comprend (fig. 9 et hors-texte, pl. XII):– les montagnes Rocheuses canadiennes et les monts Mackenzie, limités à l’ouest par le fossé des montagnes Rocheuses (Rocky Mountain Trench ), et qui sont largement charriés sur la plate-forme intérieure;– la chaîne d’Omineca, constituée par le bord tectonisé – à partir du Jurassique moyen (180 Ma) – de la marge paléozoïque américaine qui supporte des nappes du Paléozoïque supérieur à matériel océanique.Au Mexique , l’originalité du domaine oriental (Sierra Madre orientale et sierra de Chiapas), homologue des domaines cordillérains précédents, tient au fait qu’il se situe, du Jurassique supérieur (160 Ma) au Crétacé supérieur (100 Ma), en bout de la Téthys, cet océan aujourd’hui disparu dont sont nées les chaînes alpines s’étendant des Caraïbes à l’Indonésie.C’est ainsi que l’ouverture du golfe du Mexique détermine au Jurassique supérieur (160 Ma; fig. 7 f) l’individualisation, dans le soubassement mexicain, de bassins allongés, encadrés de plates-formes recouvertes plus tardivement (au Néocomien, 120 Ma) par la transgression téthysienne. À l’Albien (100 Ma), l’organisation paléogéographique liée à la progression de la Téthys est établie. On distingue alors, du nord-est vers le sud-ouest:– des plates-formes carbonatées nord-orientales séparées par les bassins épicontinentaux subsidents de Chihuahua et de Sabinas ouverts en losange entre les linéaments du Texas et de Caltam lors du jeu décrochant senestre de ces derniers (cette genèse est dite en pull-apart );– un bassin mexicain dont le fond est certainement océanique dans sa partie sud;– une plate-forme carbonatée occidentale comprenant le bloc d’Oaxaca et à laquelle on doit rattacher le bloc du Honduras.Cette configuration paléogéographique disparaît dès le Turonien (90 Ma) avec l’arrivée de dépôts terrigènes provenant d’une cordillère en surrection à l’ouest, et qui vont progressivement gagner vers l’est en précédant des épisodes tectogénétiques. Le premier de ceux-ci est marqué dans la partie sud du bassin mexicain, qu’il referme, métamorphise et charrie sur la plate-forme nord-orientale au Campanien (85 Ma). Le deuxième, laramien, intervient au Paléocène (60 Ma); il est à l’origine de l’éjection du bassin mexicain en nappes de charriage sur les plates-formes du nord-est, de l’écaillage de celles-ci (fig. 11) et de l’écrasement des bassins de Chihuahua et de Sabinas en chaînes à double déversement. Le troisième, au Miocène supérieur (7 Ma), structure la sierra de Chiapas et, en mer, les Mexican Ridges (fig. 11). Il est à mettre en relation avec l’ablation et le déplacement relatif vers l’est de l’extrémité sud du continent nord-américain. Celle-ci constitue aujourd’hui, au sein de la plaque Caraïbes, l’Amérique centrale nucléaire. La troncature s’est produite avec la naissance du vaste système décrochant senestre de la transversale de Polochic-Motagua, toujours actif dans le Chiapas et au Guatemala (hors-texte, pl. XII). On a certainement là un bel exemple de «collage» après un long coulissage (1 100 km) avec transpression ayant débuté à l’Oligocène supérieur (25 Ma), celui du bloc du Honduras (à l’origine dans le prolongement sud du bloc d’Oaxaca) contre la Sierra Madre de Chiapas, partie la plus externe de l’édifice mexicain (J. Azéma et al., 1985).Le domaine pluto-volcaniqueAux États-Unis , le domaine pluto-volcanique regroupe la sierra Nevada, les monts Klamath (Californie) et les Blue Mountains (Oregon), dans lesquelles le Mésozoïque, à dominante volcanogène, est traversé par des granites dont l’âge s’échelonne du Trias au Crétacé. Ce Mésozoïque a été structuré au cours de phases précoces: cimmérienne à la limite Trias-Lias (200 Ma) et névadienne au Jurassique supérieur (140 Ma). Cette dernière phase paraît avoir mis en contact une première fois (par charriage?) le domaine pluto-volcanique avec le domaine cordillérain.La phase orogénique du Crétacé moyen (100 Ma), à l’origine du second charriage de l’ensemble du domaine volcano-plutonique sur le domaine cordillérain, a également provoqué le cisaillement des monts Klamath vers le Pacifique. Le Crétacé supérieur marque ainsi le début d’une évolution symétrique (fig. 10): à partir du domaine pluto-volcanique incorporé à la marge américaine, l’orogenèse gagne ensuite progressivement vers l’est – pour donner naissance aux structures du domaine cordillérain (cf. supra ) – et vers l’ouest – pour donner naissance au domaine franciscain (cf. infra ).Au Mexique , le domaine pluto-volcanique se retrouve en Basse-Californie, sous les volcanites tertiaires de la Sierra Madre occidentale et dans la Sierra Madre du Sud. Il s’agit, là encore, de puissantes séries volcaniques et volcano-détritiques à rares passées sédimentaires et intrusions calco-alcalines d’arc insulaire marquées par les déformations névadienne et du Crétacé supérieur à l’origine d’un même double déversement sur les séries franciscaines de Basse-Californie, à l’ouest, et sur le domaine oriental, dans le Mexique central (fig. 11).Les similitudes sont donc grandes avec le domaine pluto-volcanique des États-Unis. Aussi a-t-on pu envisager l’existence d’un véritable «bloc américano-méxicain» ayant eu valeur d’arc insulaire pendant le Trias et le Jurassique et qui, accrété au continent nord-américain, en aurait constitué la nouvelle marge à partir du Crétacé. Il demeure cependant que l’on n’a pas signalé de cicatrice ophiolitique entre ce domaine pluto-volcanique et le domaine cordillérain.Au Canada , le domaine pluto-volcanique est constitué par le bloc de Stikine (fig. 9), qui affleure depuis la frontière des États-Unis, au sud, jusqu’au Yukon, au nord. Marqué par un épisode métamorphique du Trias supérieur (Cimmérien, 200 Ma), il entre en collision avec la marge américaine, qu’il chevauche à partir du Jurassique moyen (180 Ma).Le domaine franciscainBien représenté aux États-Unis dans la chaîne côtière, ou Coast Range, de Californie (fig. 10), tandis que son prolongement sud se rencontre au Mexique sur la façade pacifique de la péninsule de Basse-Californie, le domaine franciscain s’enfonce vers l’est en sous-charriage sous le domaine pluto-volcanique.Deux ensembles y sont distingués: d’est en ouest, celui de la Great Valley, comportant à sa base des ophiolites jurassiques surmontées d’une puissante série détritique crétacée et tertiaire, et celui des séries franciscaines du Jurassique-Crétacé (de haut en bas de la pile tectonique et d’est en ouest: unités de schistes bleus du Jurassique supérieur, unités de mélanges du Crétacé, unités faites de séries sédimentaires de type océanique du Jurassique et du Crétacé).La structure générale est relativement simple: l’ensemble de la série Great Valley chevauche les unités de schistes bleus, qui chevauchent les unités de mélanges, qui chevauchent les unités sédimentaires. La tectogenèse à l’origine de ce dispositif est datée du Crétacé terminal-Éocène moyen (de 65 à 45 Ma).Des mouvements postérieurs perturbent cependant ce dispositif initial. Il s’agit de ploiements qui dégagent des fenêtres dans de vastes anticlinaux, comme celui du mont Diablo, à l’est de San Francisco, et, surtout, du célèbre système de failles de San Andreas (fig. 10), qui comprend pour l’essentiel des accidents coulissants dextres de direction nord-ouest - sud-est entre le cap Mendocino et le golfe de Californie associés à des failles senestres de direction est-nord-est - ouest-sud-ouest (failles de Garlock). Ce complexe actif est assimilé à un système transformant en domaine continental faisant la jonction entre deux segments de la ride est-pacifique, du golfe de Californie, ouvert récemment (5 Ma), à la ride de Juan de Fuca, en passant par le système transformant de la faille de Mendocino (hors-texte, pl. XII).Au Canada, un important dispositif de failles coulissantes dextres fonctionne depuis le Crétacé. Il est bien exprimé entre le fossé des montagnes Rocheuses, à l’est, et la faille de la Reine-Charlotte, à l’ouest, encore active aujourd’hui (hors-texte, p. XII). Ces failles dilacèrent la chaîne d’Omineca et le bloc de Stikine (fig. 9), avec des rejets de plusieurs centaines de kilomètres. L’ampleur des mouvements entre les principaux blocs séparés par des aires océaniques a été mis en évidence par les données du paléomagnétisme, qui ont amené les chercheurs à différencier des «terrains» (terranes ), chacun d’entre eux, limité par des failles, possédant une entité lithostructurale différente de celle du terrain voisin.Le magmatismeUn dernier trait géologique marquant des cordillères nord-américaines est l’omniprésence d’un puissant magmatisme (hors-texte, pl. XII) qui souligne l’étroite liaison existant, au cours du Mésozoïque et du Cénozoïque, entre l’évolution géodynamique du système montagneux et les subductions du Pacifique.Les plutons granitiques calco-alcalins se sont mis en place au Trias, au Jurassique, au Crétacé et au Tertiaire. Le batholite complexe de la sierra Nevada est l’un des plus connus; il se poursuit au sud dans la partie nord de la péninsule de Basse-Californie, constituant de ce fait, dans le domaine pluto-volcanique, l’un des plus grands batholites du monde. Mais la granitisation dépasse de beaucoup la frange occidentale des cordillères: les batholites crétacés atteignent presque le front de l’Over-Thrust Belt, comme ceux de l’Idaho et de Boulder (Colorado), tandis que les plutons tertiaires, de taille plus modeste mais très disséminés (fig. 10), dépassent vers l’est le front de déformation laramien jusque dans la plate-forme américaine (Texas) ou la plaine côtière du golfe du Mexique.Le volcanisme tertiaire , discordant, a constitué de remarquables édifices. On notera (hors-texte, pl. XII, fig. 7 h et i):– au Mexique, la Sierra Madre occidentale qui, sur 1 200 kilomètres de longueur du nord au sud et 250 kilomètres de largeur, est formée par un impressionnant empilement de volcanites d’âge éocène-oligocène (andésites, ignimbrites, basaltes);– le plateau volcanique de la Columbia, dont la naissance est probablement liée à la fracturation de la cordillère lors de la rotation de 450 dans le sens horaire des Blue Mountains (situées au nord du plateau de la Columbia) par rapport à l’axe sierra Nevadamonts Klamath;– le complexe Yellowstone-Snake River, qui est généralement interprété comme engendré par un «point chaud»;– le volcanisme en marge du plateau du Colorado, lié en particulier au rift du rio Grande;– le volcanisme calco-alcalin, qui est lié à la subduction actuellement active du Pacifique, avec, au sud et au nord du système transformant de San Andreas, le volcanisme de l’Amérique centrale – au sud du système transformant de la transversale de Polochic-Motagua –, l’axe volcanique transmexicain – véritable chaîne de 1 000 kilomètres de longueur traversant le Mexique du Pacifique au golfe du Mexique à la hauteur de Mexico (fig. 7 i et fig. 11) –, et la chaîne des Cascades du nord-ouest des États-Unis (hors-texte, pl. XII et fig. 7 i).3. Le domaine caraïbe et l’Amérique centraleSitués entre les continents nord-américain et sud-américain, le domaine caraïbe et l’Amérique centrale appartiennent à la plaque Caraïbes, qui se déplace vers l’est à la vitesse relative de 2 centimètres par an environ (hors-texte, pl. XVI). La sismicité actuelle révèle clairement la configuration de cette plaque (fig. 12).Au nord, la plaque est limitée par le système décrochant senestre de Polochic-Motagua (ou transversale de Polochic-Motagua), la dorsale d’accrétion océanique de direction nord-sud des Caïmans (longue de 80 km et large de plus de 1 000 km), deux failles transformantes (failles de Swan et de l’Oriente), et le système décrochant senestre de Porto Rico (avec une composante de subduction de l’Atlantique sous les Caraïbes). À l’est, la subduction des Petites Antilles, qui détermine à son front le prisme d’accrétion de la Barbade, apparaît très nettement comme une zone à sismicité intense. Au sud, la plaque Caraïbes est séparée de l’Amérique du Sud par les failles décrochantes dextres d’El Pilar (de direction est-ouest) et de Bocono (de direction nord-est - sud-ouest), les chevauchements de la zone de Pamplona, en Colombie, qui témoignent d’un rapprochement est-ouest des plaques Caraïbes et Amérique du Sud, et la faille de Dolorès-Guayaquil, qui débouche dans le golfe de Guayaquil, en Équateur. Enfin, à l’ouest, les subductions de la plaque de Nazca (à regard est) et de la plaque des Cocos (à regard nord-est) sont soulignées par une zone à sismicité très intense.Au sens géologique, le domaine caraïbe ne correspond pas exactement à ces limites. Ainsi la plaque Caraïbes actuelle incorporet-elle la frange nord de l’Amérique du Sud (chaîne andine du Venezuela et du nord de la Colombie), alors que Cuba et le bassin du Yucatán, à l’histoire géologique caraïbe, font maintenant partie de la plaque Amérique du Nord (hors-texte, pl. XVI), depuis la phase laramienne de la limite Crétacé-Tertiaire (de 65 à 60 Ma).Le domaine marin caraïbe (hors-texte, pl. XVI)Le bassin du Yucatán est un petit bassin à croûte océanique épaisse de 7 kilomètres environ. Sa partie centrale, profonde de 4 500 mètres, est plane et remplie localement par des sédiments d’une puissance de près de 2 kilomètres. Sa partie méridionale est moins profonde (3 000 m environ), mais accidentée de reliefs allongés nord-est - sud-ouest à nord-nord-est - sud-sud-ouest. Cette orientation est celle des anomalies magnétiques qui ont été mises en évidence sur l’ensemble du bassin. Sa croûte est supposée dater du Crétacé terminal-début du Tertiaire (de 70 à 60 Ma).La ride et le fossé des Caïmans ont une orientation est-nord-est - sud-sud-ouest. La ride des Caïmans est une succession de petites dépressions et de hauts fonds récifaux déterminés par des failles normales parallèles à la ride. Elle possède une croûte continentale amincie (de 15 à 18 km d’épaisseur). Des roches volcaniques et plutoniques du tout début du Tertiaire (de 64 à 60 Ma) y ont été draguées. Le fossé des Caïmans est étroit (130 km) et allongé (plus de 1 200 km); il s’agit d’un bassin océanique de profondeur moyenne – comprise entre 4 000 et 5 000 mètres –, dont la croûte a une épaisseur de 7 kilomètres environ. Morphostructures et anomalies magnétiques sont orientées nord-sud dans la partie centrale du fossé et nord-est - sud-ouest à son extrémité orientale. Il s’agit d’une zone d’accrétion océanique active, avec une vallée axiale (rift) à plus de 5 600 mètres de profondeur et des flancs constitués de panneaux océaniques faillés et basculés. La vitesse d’ouverture est de 2 centimètres par an environ depuis la limite Éocène-Oligocène (35 Ma). Le fossé des Caïmans est limité par de grands décrochements senestres: la faille de Bartlett/Oriente, au nord, et celle de Swan, au sud.La ride septentrionale du Nicaragua , peu profonde (moins de 1 000 m), possède une croûte épaisse de 25 à 30 kilomètres, de nature continentale. C’est une vaste plate-forme carbonatée parsemée de nombreux bancs récifaux. La couverture sédimentaire tertiaire, dont l’épaisseur atteint localement 5 kilomètres, repose sur un substratum volcanique et plutonique, d’âge crétacé supérieur, découpé par des failles, de directions nord-est - sud-ouest et nord-ouest - sud-est, qui contrôlent la sédimentation sus-jacente. Séparée par une suite de fossés (grabens de Providencia, de Bajo Nuevo), la ride méridionale du Nicaragua , plus profonde (de 2 000 mètres, à l’ouest, à 3 500 mètres, à l’est) et de topographie plus tourmentée, assure la transition avec le bassin de Colombie voisin. La croûte, épaisse de 23 kilomètres environ, est probablement de type continental aminci. Au sud, la ride est séparée du bassin de Colombie par l’escarpement de Hess, orienté nord-est - sud-ouest, long de plus de 1 000 kilomètres, que l’on interprète généralement comme un ancien décrochement.Les bassins de Colombie et du Venezuela ont une profondeur moyenne de 4 000 mètres. Ils possèdent une croûte océanique anormalement épaisse (de 15 à 20 km), considérée d’âge jurassique supérieur à crétacé inférieur (de 150 à 125 Ma), recouverte par d’épais épanchements basaltiques dont le sommet (qui forme le réflecteur sismique B , fig. 14) a été daté du Crétacé supérieur (de 80 à 70 Ma). La couverture sédimentaire, d’âge crétacé supérieur à actuel, a une épaisseur qui varie de 250 mètres au centre des bassins à 6 000 mètres sur leur bordure méridionale (apports deltaïques sud-américains); l’Éocène (de 50 à 40 Ma) est caractérisé par des dépôts siliceux bien repérables en sismiques (ils forment le réflecteur A ). La ride de Beata , de direction sud-sud-ouest - nord-nord-est, sépare ces deux bassins, qu’elle domine de 2 000 à 3 000 mètres. Son épaisseur crustale (de 15 à 20 km) est identique à celle des bassins. Elle semble correspondre à un alignement de volcans sous-marins crétacés (au moins 80 Ma) contemporains des épanchements basaltiques des bassins voisins.Les prismes d’accrétion de Muertos, du Nord-Panamá et de Colombie-Venezuela sont génétiquement comparables au prisme d’accrétion de la Barbade (cf. infra ). Ils proviennent de l’écaillage de la couverture sédimentaire des bassins caraïbes au front du cadre continental péricaraïbe.L’Amérique centraleL’Amérique centrale peut être subdivisée en Amérique centrale nucléaire, caractérisée par une croûte continentale, et en une Amérique centrale isthmique, à croûte de nature océanique.L’Amérique centrale nucléaireComprenant l’extrême sud du Guatemala, le Salvador, le Honduras et la plus grande partie du Nicaragua, l’Amérique centrale nucléaire est séparée de l’extrême sud du continent nord-américain par la zone de faille senestre de la transversale de Polochic-Motagua. Elle est caractérisée par la présence d’un «noyau» continental d’âge précambrien-paléozoïque, métamorphique, qui comprend les formations El Petén et Cacaguapa. Deux phases de déformation affectent ces unités, la première au Dévonien supérieur (350 Ma environ, phase éohercynienne), la seconde au Permien supérieur (240 Ma environ, phase tardihercynienne). En discordance sur ce socle repose une puissante série sédimentaire de plate-forme marine ou continentale du Trias supérieur au Cénomanien (de 210 à 90 Ma). Cet ensemble – socle et couverture – est affecté par une importante phase tectonique (charriages à vergence nord-est) dans le courant du Campanien (80 Ma environ, phase dite subhercynienne). Ces déformations sont cachetées par des molasses rouges continentales et lacustres (groupe Valle de Angeles, débutant au Campanien, 80 Ma) qui admettent des intercalations volcaniques andésitiques et quelques passées marines littorales. Un volcanisme andésitique et le puissant plastron ignimbritique du Miocène inférieur (de 15 à 20 Ma) masquent la plus grande partie de l’édifice ancien. Ce volcanisme andésitique, lié à la subduction de la plaque des Cocos, se poursuit jusqu’à l’Actuel.L’Amérique centrale nucléaire constitue le prolongement structural des chaînes du sud du Mexique, décalée vers l’est de plus de 1 000 kilomètres, à partir du Paléocène (60 Ma), par les décrochements senestres de Polochic-Motagua.Sur sa façade sud-ouest, l’Amérique centrale nucléaire est limitée par le front de subduction situé au niveau de la fosse d’Amérique centrale. Cette dernière voit disparaître la plaque des Cocos sous la plaque Caraïbes à la vitesse de 8 centimètres par an environ sans cependant qu’il se forme de prisme d’accrétion important sur sa bordure nord-est [cf. FOSSES OCÉANIQUES].L’Amérique centrale isthmiqueComprenant l’extrême sud du Nicaragua, le Costa Rica et le Panamá, l’Amérique centrale isthmique possède une croûte, de nature océanique, écaillée et redoublée, épaisse de plus de 40 kilomètres. Le substratum océanique, déformé, affleure essentiellement sur sa façade pacifique, dans des péninsules qui s’avancent dans l’océan (péninsules de Santa Elena, de Nicoya, et d’Osa, au Costa Rica; de Sona et d’Azuero, au Panamá). Il comprend une unité ophiolitique (nappe de Santa Elena) charriée au Campanien (vers 80 Ma) sur des unités à matériel volcano-sédimentaire océanique (complexe de Nicoya) d’âge liasique à santonien (de 185 à 85 Ma). Cet édifice est recouvert en discordance par une série d’arc insulaire du Campano-Maëstrichtien (75 Ma) à l’Actuel, entrecoupée d’épisodes récifaux et traversée d’intrusions granodioritiques.Sur sa façade caraïbe, au nord du Panamá, un prisme d’accrétion récent (du Pliocène à l’Actuel) témoigne d’un faible raccourcissement au sein de la plaque Caraïbes.Au sud-ouest du Costa Rica, la limite de la plaque Caraïbes se situe au niveau du front de subduction de la plaque des Cocos, le long de la fosse d’Amérique centrale, jusqu’à la ride des Cocos. Au-delà, au sud du Panamá, la limite entre les plaques des Cocos, de Nazca et Caraïbes est encore mal définie.La chaîne nord-caraïbeLa partie orientale de la frontière nord de la plaque Caraïbes est jalonnée par le chapelet d’îles des Grandes Antilles: Cuba, la Jamaïque, Hispaniola, Porto Rico et îles Vierges. Ces îles représentent les fragments émergés de la chaîne nord-caraïbe, dont les lanières furent découpées et décalées au Tertiaire par des décrochements senestres. L’île de Cuba comporte dans sa partie centrale les zones les plus externes de l’orogène nord-caraïbe (fig. 13 a), l’arrière du dispositif devant être recherché en Hispaniola (fig. 13 b).L’édifice nord-caraïbe (fig. 13) comprend un avant-pays – la plate-forme des Bahamas – appartenant au domaine nord-américain, qui est constitué par une série sédimentaire de plate-forme carbonatée, subhorizontale, dont la puissance atteint plus de 10 kilomètres et dont l’âge va du Jurassique à l’Actuel (de 200 à 0 Ma). Au sud de la dépression du Old Bahama Channel , les faciès du Trias supérieur au Cénomanien (de 210 à 90 Ma) deviennent de plus en plus pélagiques en allant vers le sud (zone de Cayo-Cocos, zone de Remedios, zone de Camjuani et zone de Placetas à Cuba). Ces différentes zones constituent des unités tectoniques, qui se chevauchent les unes les autres.Au-dessus de cette marge typique, une nappe ophiolitique a été charriée au Campanien (80 Ma), qui dégénère parfois à sa base en un complexe à blocs, à matrice serpentineuse, contenant de rares blocs de gneiss paléozoïque ou précambrien. En Hispaniola (fig. 13 b), la nappe comprend des termes volcano-sédimentaires (formation Siete Cabezas) datés du Santonien-Campanien (de 85 à 80 Ma).Cette nappe ophiolitique est surmontée d’une nappe constituée de matériel volcanique et volcano-sédimentaire d’arc insulaire (zone de Zaza à Cuba, formations Tireo et Los Ranchos à Hispaniola, l’essentiel de l’île de Porto Rico – nappe de Bermeja –, etc.), d’âge néocomien à sénonien (de 125 à 80 Ma), également mise en place au Campanien (80 Ma).En arrière, vers le sud, et en dessous de cette série d’arc insulaire ressort une unité à matériel océanique métamorphisé sous le faciès des amphibolites (amphibolites de Mabujina à Cuba, formation Duarte en Hispaniola, schistes de Westphalia à la Jamaïque, amphibolites du sud-ouest de Porto Rico), unité qui est traversée par des intrusions granodioritiques datées du Crétacé inférieur (119 Ma). Cet ensemble représente le substratum métamorphique sur lequel s’est installé l’arc insulaire à partir du début du Crétacé (Néocomien).Dans le massif de l’Escambray, un complexe carbonaté-terrigène daté du Jurassique-Crétacé inférieur, métamorphisé dans le faciès des schistes verts atteignant parfois le faciès des schistes bleus, apparaît en fenêtre sous les unités précédentes. Il représente l’autochtone relatif de la chaîne nord-caraïbe, ici enfoui dans l’infrastructure de la chaîne, sous la pile des nappes précédentes; il se relie sans doute aux unités les plus distales de l’autochtone nord-caraïbe sous l’ensemble des nappes ainsi complètement déracinées. Ces séries se retrouvent dans l’île de Juventud et ont été rapprochées des formations détritiques pélagiques non métamorphiques de l’ouest cubain (formations San Cayetano et Jagua). Un ensemble équivalent se retrouve dans la cordillère septentrionale dominicaine et dans la presqu’île de Samaná en Hispaniola, ainsi qu’en Jamaïque (schistes de Mount Hibernia). Les séries de schistes bleus de l’Oriente de Cuba (sierra del Purial) ainsi qu’une formation de schistes verts d’Hispaniola (formation Maimon) sont dans la même position tectonique mais dérivent des séries plus océaniques.Cet édifice nord-caraïbe, mis en place au Campanien (80 Ma, phase dite subhercynienne dans le calendrier de Hans Stille), est recouvert en discordance par des sédiments détritiques qui débutent au Maëstrichtien (vers 75 Ma). Une activité d’arc insulaire persiste jusqu’à l’Éocène inférieur, notamment dans l’Oriente cubain (sierra Maestra: formation Cobre) et peut-être à la Jamaïque.Des événements compressifs se manifestent au Maëstrichtien-Paléocène (de 65 à 50 Ma, phase dite laramienne), puis à l’Éocène supérieur (35 Ma). Ils accompagnent le début du fonctionnement des grands décrochements senestres.À partir de l’Éocène, et essentiellement au Miocène, le nord de la ride de Beata entre en collision oblique avec le sud d’Hispaniola: des écailles sédimentaires, chevauchant vers le sud, viennent alors s’accréter en arrière (vers le sud) de la chaîne caraïbe (presqu’île du sud d’Haïti, sierras de Baoruco et de Neiba en Hispaniola, etc.).La chaîne nord-caraïbe est née au Campanien (80 Ma) de la collision d’un arc insulaire – installé à partir du Néocomien (125 Ma) sur un substratum océanique déformé antérieurement – avec la marge de l’Amérique du Nord et du golfe du Mexique. L’édifice a été repris en nappes au Maëstrichtien-Paléocène puis dilacéré par de grands décrochements senestres. Actuellement, au nord de Porto Rico et de son prolongement oriental – le plateau des îles Vierges –, la subduction très oblique de l’Atlantique sous la plaque Caraïbes détermine la fosse de Porto Rico (ou fosse de Milwaukee), la plus profonde du domaine atlantique (8 381 m).L’arc des petites Antilles «lato sensu»L’arc des Petites Antilles stricto sensu possède une croûte de plus de 35 kilomètres d’épaisseur. Au nord de la Martinique, l’arc est double: il comprend un arc externe, à l’est, où le substratum volcanique est recouvert d’entablements calcaires (Petites Antilles calcaires), et un arc interne, à l’ouest, essentiellement volcanique (Petites Antilles volcaniques). L’activité volcanique cénozoïque y a migré d’est ou ouest, depuis l’arc externe, à l’Éocène-Oligocène (de 45 à 35 Ma), jusqu’à l’arc interne, au Plio-Quaternaire (de 5 Ma à l’Actuel). Le segment méridional ne comporte qu’un seul arc volcanique. L’arc cénozoïque s’appuie sur un arc volcanique mésozoïque qui affleure en particulier à la Désirade (Jurassique supérieur-Crétacé inférieur: de 150 à 130 Ma) et dans les Grenadines (Crétacé supérieur: de 70 à 80 Ma).Le prisme d’accrétion de la Barbade résulte du rabotage de la couverture sédimentaire du plancher océanique atlantique en cours de subduction sous l’arc des Petites Antilles. Long de plus de 1 200 kilomètres, le prisme s’élargit du nord au sud, jusqu’à un maximum de 120 kilomètres à l’approche du continent sud-américain (du fait des apports sédimentaires de l’Orénoque et de l’Amazone). Les sédiments les plus anciens affleurent sur l’île de la Barbade (Paléocène: 65 Ma), sous laquelle le prisme atteint plus de 20 kilomètres d’épaisseur.Le bassin de Tobago , propre à la moitié méridionale de l’arc, a pour substratum l’arc volcanique mésozoïque qui affleure au niveau de l’île de Tobago; il s’appuie à l’est contre le prisme d’accrétion de la Barbade.La ride d’Aves possède une croûte continentale de plus de 30 kilomètres d’épaisseur. D’une profondeur moyenne de 1 000 à 1 500 mètres, elle est parsemée de reliefs isolés dont un seul atteint la surface (île d’Aves, à l’ouest de la Guadeloupe). Il s’agit d’un ancien arc volcanique actif du Cénomano-Turonien (de 90 à 85 Ma) au moins, jusqu’au Paléocène basal (65 Ma). Le substratum volcano-plutonique et volcano-sédimentaire crétacé est drapé par des sédiments essentiellement carbonatés d’âge éocène moyen à actuel (de 45 à 0 Ma).Le bassin de Grenade est bien exprimé dans la moitié méridionale de l’arc des Petites Antilles. Profond de 2 800 mètres, il présente un remplissage détritique tertiaire de plus de 6 kilomètres d’épaisseur reposant sur une croûte probablement océanique. La profondeur et le remplissage diminuent vers le nord, où le substratum est de type arc insulaire. L’ouverture du bassin de Grenade et l’arrêt de l’activité volcanique de l’arc d’Aves se sont produits au Paléocène-Éocène inférieur (de 65 à 50 Ma).La zone frontière sud-caraïbe: chaîne sud-caraïbe et Andes septentrionalesLa zone frontière entre les plaques Caraïbes et Amérique du Sud comprend deux édifices génétiquement distincts qui en constituent l’ossature: la chaîne andine et la chaîne sud-caraïbe. Elle est marquée par la présence de grands décrochements intimement associés à la structuration des deux chaînes : décrochements dextres d’El Pilar et d’Oca (de direction est-ouest), de Bocono (nordest - sud-ouest), décrochements senestres de Santa Marta-Bucaramanga (nord-nord-ouest - sud-sud-est). Bien que les différents décrochements soient actifs, l’essentiel du mouvement et de la déformation actuels se concentre sur le couple El Pilar-Bocono, qui absorbe la moitié du déplacement relatif (1 cm/an environ).La chaîne andine stricto sensu (Andes à ophiolites exclues) est une chaîne de socle qui s’étend sur plus de 450 kilomètres de largeur, et dont la direction globale est nord-nord-est - sud-sud-ouest. Son histoire géologique l’apparente plus au bloc sud-américain, dont le socle constitue l’ossature des Cordillères centrale et orientale, notamment la sierra de Santa Marta et la sierra de Mérida à leur extrémité nord, la première dominant de près de 6 000 mètres la mer des Caraïbes à l’est de Barranquilla.La chaîne sud-caraïbe , ensemble de cordillères de direction est-ouest à est-nord-est sud-sud-ouest ne dépassant que rarement 2 000 mètres d’altitude, borde sur plus de 1 200 kilomètres de longueur la façade caraïbe de l’Amérique du Sud. Il s’agit d’un édifice de nappes comportant en particulier des lambeaux océaniques et des fragments d’arcs volcaniques. Dans sa partie centrale et orientale, la chaîne est charriée vers le sud-sud-est sur la plate-forme guyanaise. À l’ouest, à sa rencontre avec la terminaison nord-andine, le front de la chaîne s’infléchit brutalement vers le nord-nord-ouest, déterminant la «transversale de Barquisimeto». Au-delà, vers l’ouest, la chaîne caraïbe semble se raccorder aux Andes à ophiolites de Colombie (sierras de San Jacinto dans le département de Bolívar et l’État de Sucre, Cordillère occidentale) par l’intermédiaire des écailles des péninsules de Paraguaná et de la Guajira, qui encadrent l’entrée de la lagune de Maracaibo, et de la pointe nord-ouest de la sierra de Santa Marta.Au niveau du méridien de Caracas, la chaîne sud-caraïbe comprend, du sud au nord, c’est-à-dire de l’avant-pays sud-américain à l’arrière-caraïbe, les unités et dispositifs suivants (fig. 14):– une nappe de flyschs paléocène-éocène (de 64 à 45 Ma), la nappe piémontine , charriée vers le sud-est sur les molasses oligo-miocènes (de 35 à 15 Ma) de la plate-forme guyanaise;– un empilement de nappes, ployé en anticlinal d’axe est-ouest, charrié sur la nappe piémontine et constitué, de bas en haut, par: la nappe de la cordillère côtière , dont le matériel correspond à un fragment de l’ancienne marge téthysienne de l’Amérique du Sud sous forme d’une succession métamorphique comprenant un socle précambrien et paléozoïque et une couverture du Jurassique supérieur-Crétacé; la nappe de la frange côtière-Margarita , qui représente une suture ophiolitique métamorphisée au Crétacé supérieur (80 Ma environ) dans le faciès des amphibolites; la nappe de Tinaco-Tinaquillo , qui est constituée d’un fragment d’affinité andine, avec un socle prémésozoïque et une couverture volcano-sédimentaire crétacée débutant à l’Aptien (110 Ma); la nappe de la Loma de Hierro , qui représente une suture ophiolitique non métamorphique avec des lambeaux océaniques du Crétacé inférieur (de 110 à 130 Ma); enfin, au sommet de l’édifice, la nappe de Villa de Cura formée d’un paléo-arc volcanique crétacé (et peut-être plus ancien?).La coupe se poursuit en mer, au nord du décrochement d’El Pilar, par: le bassin de Bonaire , rempli par 3 à 5 kilomètres de sédiments peu déformés d’âge oligocène à actuel (de 35 à 0 Ma), et dont le substratum – qui rappelle les nappes Loma de Hierro et Villa de Cura de la chaîne sud-caraïbe – émerge au niveau de la ride des Antilles vénézuéliennes et néerlandaises, ou «îles Sous-le-Vent»; les premières sont constituées de Mésozoïque métamorphique incluant des ultrabasites; les secondes mettent à l’affleurement le paléo-arc volcanique crétacé et sa couverture calcaire discordante d’âge éocène moyen (40 Ma environ); le bassin de Los Roques et la ride de Curaçao , éléments du prime d’accrétion colombo-vénézuélien d’âge oligo-miocène à actuel, qui chevauche vers le nord le bassin du Venezuela.Vers l’ouest, au niveau de la transversale de Barquisimeto, les nappes supérieures s’effilochent au sein d’un complexe à blocs à matrice paléocène-éocène qui enregistre l’arrivée des nappes et est lui-même charrié sur l’autochtone de la sierra de Mérida. Le contact tectonique entre chaîne sud-caraïbe et domaine andin est scellé par les dépôts oligo-miocènes (plissés) des sierras du Falcón.La chaîne sud-caraïbe est née de la superposition de plusieurs phases tectoniques:– dans l’intervalle Jurassique supérieur-Crétacé inférieur (de 140 à 110 Ma), des panneaux de croûte océanique téthysienne ont été charriés sur la marge sud-américaine;– au Crétacé supérieur (80 Ma environ), l’arc volcanique situé au front de la plaque Caraïbes entre en collision avec la façade nord-ouest du continent sud-américain; il s’agit de la phase la plus visible de l’orogène sud-caraïbe;– au Paléocène-Éocène (de 65 à 40 Ma), la chaîne précédente et la bordure sud-américaine sont débitées en grandes nappes à vergence sud-est, qui viennent envelopper la terminaison nord-andine (transversale de Barquisimeto);– depuis le Miocène moyen (15 Ma environ), l’édifice est découpé en lanières par les décrochements dextres de direction est-ouest (comme celui d’El Pilar); il gagne vers l’est avec l’apparition de nouvelles chaînes nées en régime de décrochement-compression, ou transpression (nord-est du Venezuela, sud de l’île de la Trinité).4. L’Amérique du SudEn Amérique du Sud, on oppose classiquement une Amérique cratonique orientale, stable, et une Amérique andine occidentale, tectoniquement active (hors-texte, pl. XIV et fig. 1).Cette situation est née de l’évolution secondaire et tertiaire pendant le cycle andin qui débuta voilà 200 millions d’années en relation avec la subduction du Pacifique sous l’Amérique du Sud.Antérieurement, la répartition des zones stables et des ceintures de déformation était très différente. En témoignent les restes d’orogènes anciens, paléozoïques et précambriens, dont on retrouve les traces à travers les grandes unités morphostructurales qui constituent aujourd’hui le continent sud-américain.L’Amérique du Sud cratonique est constituée de noyaux de socles anciens – les boucliers guyanais et brésilien ainsi que quelques affleurements qu’on rassemble parfois en un bouclier patagon –, ossature profonde du sous-continent lui-même. Les bassins de Parnaíba et du Paraná séparent un bouclier brésilien central d’un bouclier brésilien oriental (ou côtier). La dépression transcontinentale de l’Amazone, qui sépare le bouclier brésilien du bouclier guyanais, se trouve dans le prolongement de la faille transformante de la Romanche. Les divers bassins qui viennent d’être évoqués se sont individualisés au Primaire, entre 600 et 400 millions d’années.Au sud du Río de La Plata et de la sierra de Tandil, les sierras Pampeanas, la sierra de la Ventana et le massif patagon portent les marques de l’orogenèse hercynienne qui prend en écharpe la partie méridionale de l’Amérique du Sud.Les plaines centrales qui s’étendent largement en avant des Andes, des llanos colombo-vénézuéliens aux pampas argentines, enveloppent les massifs anciens de l’Amérique cratonique.À l’ouest, la cordillère des Andes (8 000 km du nord au sud) borde le continent sur toute sa longueur. Cette puissante chaîne de montagnes qui culmine à l’Aconcagua (6 959 m) présente trois segments: on oppose en effet classiquement les Andes centrales, sans ophiolites, comprises entre les transversales de Huancabamba (40 S.) et de Bariloche (410 S.), aux Andes distales, à ophiolites, comprenant les Andes septentrionales d’Équateur et de Colombie, et les Andes australes, patagonnes et de Magellan.La branche sud de l’orogène caraïbe se trouve dans le prolongement de la ceinture de déformation andine, qui enveloppe de la sorte le nord du continent, tandis que vers le sud, le long de la frontière avec la plaque Scotia, le système patagon représente l’équivalent austral de la situation caraïbe.La fosse du Pérou-Chili (ou fosse d’Atacama), une des plus longues du monde, suit l’édifice andin sur presque toute sa longueur, de Bahía Solano, en Colombie, jusqu’à la péninsule de Taitao, au Chili. Cette fosse, profonde de plus de 8 000 mètres au large du Chili, est l’expression morphologique de la subduction du Pacifique (plaque de Nazca) sous le continent sud-américain (hors-texte, pl. XIV). Cette situation particulière a permis de proposer les Andes comme l’exemple type d’une chaîne de subduction. De fait, une partie importante des reliefs andins correspond aux édifices volcaniques qui marquent puissamment la morphologie de cette chaîne de montagnes. Par ailleurs, l’activité sismique (fig. 19) qui caractérise cette région confirme le caractère actif de la déformation qui préside à l’édification de l’orogène depuis 100 millions d’années.À la marge active pacifique du continent sud-américain s’oppose la marge passive atlantique, dont l’individualisation remontre au milieu du Crétacé (100 Ma). Par son extension, le plateau continental des îles Malouines (ou Falkland) est l’une des structures majeures de cette marge.Le Précambrien des boucliers (fig. 15)L’ArchéenLes plus anciennes formations de l’Amérique du Sud correspondent à des roches métamorphiques (gneiss, migmatites, amphibolites) des Guyanes et du Venezuela méridional, dont l’âge radiométrique est de 4 milliards d’années environ, et qui sont affectées par l’orogenèse hylienne .Un événement tectono-métamorphique, qualifié de gurien au Venezuela, affecte des complexes de roches plus anciens que 3 milliards d’années. On y reconnaît des roches d’origines sédimentaire (schistes et quartzites) et volcanique (spilites, pillow lavas) qui s’organisent selon une paléogéographie orientée est-ouest dans les Guyanes et dont l’avant-pays se situait plus au sud. L’orogenèse gurienne , datée de 2 600 梁 100 millions d’années, existe également dans le bouclier brésilien oriental. L’ensemble de ces événements est accompagné de métamorphisme et d’intrusions granitiques datées de 3 000 à 2 600 millions d’années.Le ProtérozoïqueUn troisième cycle précambrien est représenté par des schistes et des grès qui reposent en discordance sur les roches préalablement décrites. Leur déformation et leur métamorphisme sont dus à l’orogenèse caraïbe (qu’il ne faut pas confondre avec la formation, beaucoup plus récente – de 200 Ma à l’Actuel –, des chaînes qui entourent la mer des Caraïbes, cf. supra et infra ), équivalente des plissements transamazoniens (de 2 100 à 1 800 Ma) du nord du Brésil. Des intrusions grano-dioritiques datées de 2 200 à 1 800 millions d’années traversent ces séries. Dans le domaine andin, le massif d’Arequipa porte les traces de cette orogenèse.Les Brasilides correspondent à une vaste ceinture plissée, de direction générale subméridienne, reconnue de l’embouchure de l’Amazone jusqu’à l’estuaire du Río de La Plata. Déformations tectoniques et métamorphismes associés interviennent entre 1 000 et 600 millions d’années en deux phases essentielles qualifiées de Brasilides inférieures et de Brasilides supérieures . Les déformations brasilides épargnent totalement le bouclier guyanais, où la formation Roraima (1 700 Ma) repose horizontalement, en discordance, sur des roches métamorphiques plus anciennes. La vaste dépression transcontinentale de l’Amazone sépare donc deux régions dont l’histoire est différente pendant le Précambrien supérieur.Dans la partie centrale du Brésil (à l’ouest de Brasilia), une vaste région est affectée par l’orogenèse uruçuan , plus ancienne que 1 milliard d’années. Ces déformations affectent de puissantes séries schisto-gréseuses associées à des roches basiques et ultrabasiques qui marquent une suture ophiolitique, d’une part, et une épaisse couverture sédimentaire qui témoigne de l’activité d’un arc volcanique d’autre part.Les roches du cycle uruçuan sont reprises dans l’orogenèse brasilide, où elles occupent la situation structurale de zones internes. Elles sont en effet charriées vers l’est sur une ceinture de roches brasilides plissées et métamorphisées qui, à leur tour, reposent sur des terrains, plus orientaux, d’un Précambrien terminal faiblement déformé.Vers l’ouest, les Brasilides enveloppent le sud du bouclier brésilien central. Des roches du cycle brasilide inférieur, associées à des roches du cycle brasilide supérieur, sont charriées vers le nord-ouest et l’ouest dans une ceinture plissée à convexité tournée vers le nord-ouest. La polarité globale de cet ensemble est opposée à celle de la région de Brasília. Une avant-fosse molassique d’âge précambrien supérieur est impliquée dans le front de déformation de cet arc plissé.Les épisodes tectoniques des Brasilides supérieures se placent entre le Précambrien terminal (650 Ma) et le Silurien (400 Ma). Il pourrait donc s’agir, en partie au moins, de déformations calédoniennes.Le PrimaireAu cours du Primaire, la partie occidentale de l’Amérique du Sud connaît une évolution dont le terme est un édifice montagneux de type alpin, à double déversement, en relation avec la collision des cratons afro-brésilien – qui ne se sépareront qu’au cours du Secondaire – et australien. Les deux chaînes élémentaires du système, Bolivianides à l’est, Cuyanides à l’ouest, se disposent de part et d’autre d’un axe nord-nord-ouest - sud-sud-est qui s’étend du massif d’Arequipa aux sierras Pampeanas (dorsale aréquipo-pampéenne; fig. 16 a).Les Bolivianides , déversées vers l’avant-pays brésilien, sont développés dans la Cordillère orientale de Bolivie, du Pérou et du nord de l’Argentine. Un jalon important se retrouve au sud de Buenos Aires (sierra de la Ventana), dans les îles Malouines et, par-delà l’Atlantique, dans les montagnes du Cap, en Afrique du Sud.L’individualisation paléogéographique de zones externes et de zones internes remonte à l’Ordovicien et au Silurien. Dans les zones externes, peu déformées, des argiles et des grès d’âge silurien sont couverts par des flyschs d’âge dévonien à faciès malvino-cafre (de Islas Malvinas – îles Malouines – et de Cafres – peuple noir de l’Afrique australe), d’affinité sud-africaine (cf. AFRIQUE – Géologie). Les zones internes, fortement tectonisées et métamorphisées, présentent des grauwackes, des schistes et des ultrabasites du Paléozoïque inférieur associés à des flyschs du Siluro-Dévonien.Les Cuyanides (du nom de la région du Cuyo, qui rassemble les provinces de Mendoza, La Rioja et San Juan en Argentine), déversées vers l’ouest, sont bien représentées dans l’ensemble précordillère-cordillère frontale de l’Argentine moyenne, et dans la chaîne côtière chilienne. Il faut en rechercher la suite dans la chaîne tasmane, située sur le bord oriental du continent australien, ce qui implique une naissance ultérieure du Pacifique.Les zones externes, faiblement déformées, y sont représentées par une plate-forme à Brachiopodes (calcaires de San Juan), d’âge ordovicien, surmontée de schistes siluriens et de flyschs dévoniens à faunes d’affinité australo-pacifique. Les zones internes, probablement allochtones, correspondent en particulier au complexe ophiolitique de la zone de Calingasta, associée à des schistes verts ordoviciens et siluriens.La phase orogénique majeure qui donna naissance aux Bolivianides et aux Cuyanides intervint à la fin du Dévonien (phase bretonne ou acadienne: de 370 à 350 Ma); elle engendra une cordillère éohercynienne caractérisée par des nappes charriées vers l’extérieur de la chaîne et, dans les zones internes, par un important métamorphisme régional associé à un puissant plutonisme (granites, granodiorites) syntectonique à tarditectonique (de 360 à 330 Ma), localisé sur l’axe pampéen.Pendant la Dévonien, en particulier, une importante transgression se développe sur la plate-forme brésilienne (fig. 16 b). Elle donne naissance aux bassins épicontinentaux du Paraná, de Maranhão-Piauí et de l’Amazone, avec une remarquable constance de faciès et d’épaisseur (de 300 à 500 m).Une série de bassins continentaux intramontagneux et le développement de deux avant-fosses marines fortement subsidentes caractérisent le Permo-Carbonifère (fig. 16 c). L’apparition de niveaux de tillites (dépôts glaciaires fossiles) à partir du sud de la Bolivie témoigne par ailleurs de l’installation de glaciers sur la portion australe de cette cordillère, dont l’équivalent se trouve de l’autre côté de l’Atlantique, en Afrique du Sud. Les influences glaciaires persistent jusqu’à la limite permo-carbonifère. La sédimentation marine correspond à deux transgressions principales d’âge mississippien (de 360 à 320 Ma) et pennsylvanien (de 320 à 290 Ma). Dans la partie nord, la sédimentation marine du Paléozoïque supérieur se termine au Permien moyen-supérieur par une reprise des influences continentales, qui s’étendent à l’ensemble du continent après le dépôt de calcaires (formation Copacabana) en Bolivie et en Argentine, et de schistes bitumineux (formations Irati et Paraná) au Brésil.À l’emplacement du sillon amazonien, la plate-forme brésilienne est caractérisée par de puissants dépôts salifères (formation Nova Olinda) du Pennsylvanien terminal. Signalons enfin la série glacio-marine de Tubarão, dans le bassin épicontinental du Para a.Le Permien supérieur fossilise les déformations tardi-hercyniennes qui affectent les formations précédentes. Il s’agit d’un puissant plastron éruptif acide (rhyodacites et ignimbrites) qui recouvre une grande partie de l’axe de la chaîne hercynienne et qui est accompagné d’un important plutonisme granitique (de 250 à 225 Ma). Latéralement, ce volcanisme passe à des séries molassiques continentales rouges (groupe Paganzo du domaine pampéen; groupe Mitú du Pérou).Le Secondaire et le Tertiaire de l’Amérique cratoniqueLe Secondaire est essentiellement continental. Le Trias est représenté par des formations éoliennes (grès rouges) qui correspondent, comme en Afrique méridionale, à la même époque, à un climat désertique (fig. 16 d). Les reptiles et les plantes des formations triasiques d’Amérique du Sud et d’Afrique sont identiques, confirmant ainsi que ces deux continents étaient encore unis à cette époque. Au Crétacé se sont épanchées les laves basaltiques de Serra Geral (bassin du Paraná; fig. 16 f), qui constituent les plus importantes coulées connues dans l’histoire géologique du globe terrestre: elles couvrent une superficie de 900 000 kilomètres carrés, avec une épaisseur moyenne de 600 mètres. Les coulées successives sont séparées par des grès éoliens qui contiennent des restes de reptiles dinausauriens.Les dépôts marins du Crétacé inférieur (Aptien: de 120 à 110 Ma; fig. 16 f) des bordures de l’Atlantique (bassins côtiers brésiliens et gabonais) indiquent qu’à cette époque le continent de Gondwana a commencé à se fragmenter. Les transgressions marines s’accentuent au milieu du Crétacé (de 110 à 90 Ma; fig. 16 g) et au Crétacé supérieur (de 90 à 60 Ma; fig. 16 h), avec un maximum au Maestrichtien (75 Ma) témoignant de la suite de l’ouverture de l’Atlantique sud. Ces transgressions ne s’étendent jamais très loin à l’intérieur du continent actuel, à l’exception de la transgression du Maestrichtien, qui s’avance jusque dans le piémon andin d’Argentine et de Bolivie à partir de l’Atlantique (fig. 16 h).Au Tertiaire (fig. 16 i, j), les dépôts continentaux et les dépôts marins alternent. Les premiers dominent, toutefois, par suite des apports alluviaux considérables des rivières qui descendent les pentes orientales de la cordillère des Andes en pleine érosion, qui constitue par ailleurs une barrière aux pénétrations marines d’origine pacifique. Des dépôts marins liés à l’Atlantique persistent dans deux régions: la plate-forme argentine (Patagonie, bassin du Paraná) et le piémont caraïbe, au Venezuela; quelques incursions sporadiques ont lieu dans le nord-est du Brésil, notamment dans l’estuaire de l’Amazonie.Les dépôts alluviaux se poursuivent pendant tout le Plio-Quaternaire (fig. 16 k). Ils constituent la couverture d’une grande partie des bassins, en particulier de celui de l’Amazone. De vastes épanchements basaltiques se produisent à cette époque sur toute la Patagonie, en liaison avec le volcanisme de la cordillère des Andes.Le Secondaire et le Tertiaire dans la cordillère des AndesLa cordillère des Andes (hors-texte, pl. XIV) débute à son extrémité méridionale par la Terre de Feu et se poursuit, dans le sud du Chili, par la Cordillère patagonne.Plus au nord, au Chili et en Argentine, on distingue, d’ouest en est, la cordillère côtière et la cordillère principale – séparées par le graben longitudinal de la vallée centrale du Chili –, la cordillère frontale et la précordillère (fig. 17 c).Au Pérou et en Bolivie, la cordillère principale devient la cordillère occidentale (fig. 17 b), séparée vers l’est de la Cordillère orientale (ou royale, en Bolivie) par les hauts plateaux de la puna; la Cordillère royale, bordée vers l’est par les chaînes subandines, s’interrompt vers le sud, comme la puna, contre les chaînes pampéennes du nord-ouest argentin.En Équateur, les Andes comprennent une Cordillère occidentale et une Cordillère royale, séparées par une dépression centrale de haute altitude (3 000 m environ).Les Andes de Colombie se ramifient et s’ouvrent en éventail vers le nord avec, d’ouest en est, les Cordillères occidentale, centrale et orientale (fig. 17 a). La Cordillère orientale se poursuit au Venezuela dans la cordillère de Mérida, qui s’abaisse axialement vers le nord-est, et s’engage sous le front de charriage de la branche sud de l’orogène caraïbe, dont la direction générale est est-ouest (cf. supra : transversale de Barquisimeto au Venezuela).Les Andes sont classiquement divisées (en trois tronçons séparés par les transversales de Huancabamba , au nord du Pérou, et de Bariloche , dans le sud-ouest de l’Argentine: les Andes septentrionales (Colombie et Équateur), à ophiolites, les Andes centrales et méridionales (Pérou, Bolivie, nord du Chili et de l’Argentine), sans ophiolites, les Andes australes (sud du Chili et de l’Argentine), qui comprennent à nouveau des ophiolites.Les Andes septentrionales: Colombie et Équateur (fig. 17 a)L’évolution secondaire (de 240 à 60 Ma) des Andes septentrionales, situées au nord de la transversale de Huancabamba, passe par diverses étapes.Au Crétacé inférieur (125 Ma), une première étape d’obduction aboutit à la mise en place de croûte océanique pacifique (ophiolites: péridotites, amphibolites, métabasaltes et métasédiments) sur le continent sud-américain (Cordillère centrale de Colombie – fig. 17 a – et Cordillère royale d’Équateur), accompagnée d’un métamorphisme de haute pression-basse température, dans le faciès des schistes bleus.Au milieu du Crétacé, entre 120 et 80 millions d’années, un bassin marginal s’individualise au large de la Colombie et de l’Équateur (bassin Bolívar, fig. 16 g). Un soubassement de gabbros et de basaltes, des agglomérats volcaniques calco-alcalins et des séries détritiques gréseuses constituent l’essentiel du matériel qui témoigne aujourd’hui de l’existence de ce bassin. Le volcanisme calco-alcalin et le matériel détritique prouvent qu’un arc volcanique installé sur un bloc continental séparait le bassin lui-même de l’océan situé à l’ouest (arc volcanique du Baudó, fig. 16 g). Le rapprochement de cet arc et de l’Amérique du Sud vers la fin du Crétacé, entre 80 et 70 millions d’années (fig. 16 h), explique la mise en place des nappes de charriage à matériel ophiolitique de la Cordillère occidentale et l’obduction de ce matériel sur la Cordillère centrale (fig. 17 a).Pendant ce temps, à l’est de la Cordillère centrale de Colombie et de la Cordillère royale d’Équateur, un bassin subsident se développe en deux grandes étapes, au Trias-Jurassique (de 230 à 180 Ma; fig. 16 d) et au Crétacé-Tertiaire (de 130 à 30 Ma, fig. 16 f, g, h, i).L’évolution cénozoïque (de 60 Ma à l’Actuel) des Andes de Colombie et d’Équateur est marquée par la double activité des subductions océanique et continentale.Du côté océanique, le Paléocène et l’Éocène sont caractérisés par l’activité d’un arc volcanique (formation Macuchi) qui repose sur les séries ophiolitiques crétacées dans la Cordillère occidentale d’Équateur. En Colombie, le magmatisme et le volcanisme des Cordillères occidentale et centrale montrent un rajeunissement d’ouest en est. Ce dispositif traduit une migration de la subduction vers l’est depuis 45 millions d’années.La Cordillère orientale de Colombie n’existait pas au début de l’Oligocène (vers 30 Ma). L’entrée en compression de cette partie de la chaîne remonte à cette époque. Elle coïncide avec une accélération du déplacement de l’Amérique du Sud vers l’ouest, conduisant les failles normales de la bordure du bassin crétacé de la Cordillère orientale à rejouer en failles inverses. Cette bordure, située actuellement sur la frontière méridionale de la plaque Caraïbes (hors-texte, pl. XIV et XVI), correspond à une zone de raccourcissement d’environ 100 kilomètres associée au fonctionnement d’une zone de subduction continentale. Le redoublement de la croûte continentale à ce niveau (fig. 18) explique la surrection du bassin crétacé, dont les séries néocomiennes sont portées aujourd’hui à plus de 5 000 mètres d’altitude (fig. 17 a).Les Andes centrales et méridionales: Pérou, Bolivie, nord du Chili et de l’Argentine (fig. 17 b et c)Entre les transversales de Huancabamba, au nord, et de Bariloche, au sud, la cordillère des Andes, dépourvue d’ophiolites, comporte d’impressionnantes séries d’andésites. Elle est divisée en Andes centrales et méridionales, de part et d’autre du coude d’Arica (hors-texte, pl. XIV).La transition du cycle hercynien au cycle andin s’opère au Trias (fig. 16 d), qui marque le début de la subduction du Pacifique sous l’Amérique du Sud. Sur la côte du Chili central (320 S.), les épandages volcaniques du Trias moyen à supérieur (formation Pichidangui) dépassent 6 000 mètres d’épaisseur. Des faciès comparables se retrouvent au Pérou (groupe Chocolate) entre 80 S et 60 S. Les faciès plus orientaux du Pérou central, dépourvus de volcanisme, définissent un étroit sillon se terminant en doigt de gant vers le sud.Pendant le Jurassique (fig. 16 e), on reconnaît d’ouest en est, en liaison avec une subduction active du Pacifique sous l’Amérique du Sud: d’une part, un puissant arc volcanique calco-alcalin occidental, placé en bordure du Pacifique, qui comporte un bord occidental à volcanisme acide dominant, et un bord oriental à volcanisme calco-alcalin andésitique; d’autre part, un étroit sillon marin à valeur de bassin arrière-arc, jamais très profond, à croûte continentale, qui passe vers l’est à des faciès épicontinentaux. La série la plus représentative de l’arc volcanique correspond aux andésites (10 km d’épaisseur) de la formation La Negra de la chaîne côtière du nord du Chili, équivalent de la partie supérieure du groupe Chocolate du sud du Pérou.La fin du Jurassique (140 Ma) est marquée par une importante phase orogénique, la phase andine (ou phase névadienne), qui produit une émersion généralisée de l’actuel secteur côtier et se traduit par le dépôt de conglomérats (formation Rio Damas).Au Crétacé inférieur (fig. 16 f), on retrouve une paléogéographie comparable à celle du Jurassique, avec un arc volcanique actif bordant un étroit bassin marin d’arrière-arc.L’ouverture de l’Atlantique sud constitue l’événement majeur de la période crétacée. Elle se traduit, sur la face occidentale du continent, par l’orogenèse méso-crétacée , qui conduit à une première structuration de la chaîne andine.De l’Albien au Coniacien (de 115 à 88 Ma, fig. 16 g) subsiste un vaste bassin marginal d’arrière-arc, fortement subsident, à l’emplacement de la future Cordillère occidentale des Andes centrales du Pérou. Ce bassin est caractérisé par une croûte amincie et par une forte opposition de faciès entre une sédimentation de plate-forme carbonatée subsidente, à l’est, et des turbidites volcano-clastiques, à l’ouest.L’orogenèse péruvienne (dite aussi sub-hercynienne), vers 80 millions d’années, marque la fin de cette évolution, comme dans les Andes d’Équateur et de Colombie. Elle se manifeste par un chevauchement de l’arc volcanique vers l’est, et marque aussi le passage d’un régime insulaire au régime cordillérain tel qu’on le connaît aujourd’hui.Le Crétacé terminal (de 85 à 65 Ma; fig. 16 h) voit l’installation d’une cordillère volcanique discordante sur les structures précédentes (fig. 17 c), et le développement de molasses continentales rouges («couches rouges» du Pérou, de Bolivie et du nord de l’Argentine, et couches à Dinosauriens du bassin du río Neuquén, en Argentine).Les phases incaïque de l’Éocène (de 40 à 35 Ma), pehuenche du Miocène inférieur (de 25 à 20 Ma) et quechua du Miocène supérieur (de 10 à 5 Ma) conduisent à l’achèvement progressif des Andes par des chevauchements vers l’est, sur l’avant-pays sud-américain.Des éléments de plus en plus orientaux s’incorporent alors à la chaîne selon un processus d’accrétion continentale associé à la subduction continentale vers l’ouest de l’avant-pays sud-américain sous les Andes (fig. 18 b), qui s’oppose à la subduction océanique du Pacifique vers l’est sous les mêmes Andes, tout comme dans les Andes septentrionales d’Équateur et de Colombie. C’est à cette subduction continentale qu’on doit sans doute l’extrême épaisseur (70 km) de la croûte continentale sous l’Altiplano.Les Andes australes: sud du Chili et de l’Argentine (Patagonie et Terre de Feu; hors-texte, pl. XIV)Au sud de la transversale de Bariloche, les Andes australes de Patagonie incorporent à nouveau des séries ophiolitiques qui arrivent par la zone côtière, tandis qu’un nouveau bassin, dit de Magellan, se développe vers l’est en bordure de la plate-forme patagonne; en relation avec l’océan Austral, il est en liaison avec le bassin andin qui se termine en doigt de gant vers le sud (fig. 16 f, g).La chaîne de Magellan qui en résulte a connu une chronologie parallèle à celle des Andes centrales et méridionales, avec une évolution de type alpin comparable à celle des Andes septentrionales (mise en place de nappes ophiolitiques et métamorphisme de haute pression-basse température dans le faciès des schistes bleus).C’est au Jurassique (fig. 16 e) qu’apparaît le dispositif des Andes australes, avec des ophiolites (formation Sarmiento) à la côte pacifique. À la fin du Jurassique (vers 140 Ma), la phase andine se traduit par le charriage des ophiolites vers l’est, sur la plate-forme sud-américaine.Au Crétacé (fig. 16 f, g) se met en place le dispositif qui va rester celui des Andes australes jusque vers la fin du Tertiaire, avec un arc insulaire sur la bordure continentale occidentale, et un bassin marginal de Magellan, à croûte continentale amincie, s’ouvrant vers l’océan au sud (cf. infra ). La phase péruvienne (80 Ma) est caractérisée par un nouveau charriage ophiolitique vers l’avant-pays sud-américain, accompagné d’un métamorphisme de haute pression-basse température dans le faciès des schistes bleus, suivi d’un plutonisme granodioritique contemporain de celui des Andes centrales (fig. 16 h).Le Tertiaire verra la fermeture progressive du bassin de Magellan, avec migration de la déformation vers l’est, vers l’avant-pays sud-américain, comme dans les Andes centrales et méridionales.Géodynamique de la chaîne andineLe fonctionnement de deux mégastructures (fig. 18) explique l’évolution de l’ensemble des Andes pour la période récente (de 30 Ma à l’Actuel); il s’agit, d’une part, de la subduction du Pacifique (plaque de Nazca) sous le continent sud-américain (subduction océanique), d’autre part, de la subduction du socle de l’avant-pays andin et de sa couverture sédimentaire sous les Andes (subduction continentale).La subduction du Pacifique , bien individualisée aujourd’hui par l’étude de la sismicité (fig. 19), développe une fosse océanique – la fosse du Pérou-Chili – depuis la péninsule de Taitao, au sud du Chili, jusqu’à Bahía Solano, en Colombie. Cette subduction induit à terre la formation d’une chaîne volcanique active qui marque une interruption de 20 S. à 160 S. et de 280 S. à 330 S., en liaison avec un changement de pendage du plan de Wadati-Benioff, plus faible dans ces régions. Deux rides asismiques – la ride de Carnegie (au large de l’Équateur) et la ride de Nazca (au large du Pérou) – plongent sous le continent sud-américain avec la plaque de Nazca qui les porte, ce qui provoque un soulèvement important du mur interne de la fosse et de la côte avoisinante, bien démontré au Pérou par l’analyse du soulèvement plio-quaternaire des plages de la région de Nazca.La subduction continentale des plaines centrales sud-américaines développe une activité sismique bien individualisée en Colombie et au Pérou. En Colombie, celle-ci jalonne la frontière méridionale de la plaque Caraïbes, dont le tracé relie, de Trinidad à l’Équateur, les subductions à vergences opposées des fosses de la Barbade et du Pérou-Chili.Les données géophysiques montrent l’existence d’une racine crustale importante sous les Andes, épaisse de 50 à 80 kilomètres au Pérou (fig. 20). La situation très orientale de cette racine (à 800 km de la fosse en Colombie) suggère que la subduction continentale joue un rôle prépondérant dans sa constitution.Dans les Andes patagonnes, la subduction continentale prend une orientation est-ouest le long de la frontière septentrionale de la plaque Scotia. Au sud des îles Malouines, des profils marins de sismique réflexion montrent que le plateau continental argentin s’engage sous une ceinture de roches déformées situées dans le prolongement de la cordillère de Darwin (Terre de Feu).Le domaine de la Scotia et le passage à l’AntarctiqueEntre l’Amérique du Sud et le continent antarctique se place le domaine de la Scotia, dont le dispositif général rappelle celui des Caraïbes. On distingue en effet un cadre structural péri-Scotia et un domaine océanique de la Scotia.Le cadre structural péri-Scotia relie la Terre de Feu à la péninsule Antarctique; les îles Géorgie du Sud et Sandwich du Sud, Orcades du Sud et Shetland du Sud constituent les jalons de la cordillère de la Scotia, dont la branche nord est marquée par une tectonique compressive d’âge crétacé (100 Ma) accompagnée de métamorphisme et du charriage d’ophiolites vers le nord (cordillère de Darwin en Terre de Feu), le tout repris dans des phases tectoniques ultérieures, avec migration du front de la déformation vers le nord, vers l’avant-pays sud-américain.Le raccord entre les branches nord et sud s’effectue par l’intermédiaire de l’arc volcanique actif de l’archipel des Sandwich du Sud, dont les roches les plus anciennes remontent à 5 millions d’années environ.Le domaine océanique de la Scotia, complexe, est subdivisé en trois bassins principaux: un bassin occidental (ouvert entre 30 et 6 Ma), un bassin central (ouvert entre 21 et 6 Ma) et un bassin oriental, dont l’ouverture a commencé il y a 7 millions d’années.Les limites actuelles de ce qu’on appelle plaque Scotia (comme on dit plaque Caraïbes dans son sens de plaque récente; cf. supra ) correspondent, au nord et au sud, à de grands décrochements, respectivement senestres et dextres, qui encadrent à l’est l’arc et la fosse des Sandwich du Sud (d’une profondeur de 8 000 m) associés à la subduction de la croûte océanique atlantique; à l’ouest, la frontière de la plaque Scotia correspond à la zone de fracture complexe de Shackelton, qui s’ouvre sur le Pacifique sud.5. Les Amériques et la tectonique globaleLes Amériques et les modèles géodynamiquesÀ l’instar de l’Ancien Monde, les Amériques fournissent des informations sur les modèles géodynamiques principaux, qu’il s’agisse de l’ouverture océanique, des subductions océanique et continentale, de l’obduction ophiolitique ou de la collision continentale.Les différents stades de l’ouverture océanique y sont représentés, qu’il s’agisse du stade de début, avec le golfe de Californie (ou mer de Cortés), qui appelle une comparaison avec la mer Rouge, ou du stade adulte, dont l’Atlantique est l’exemple accompli.À l’exception du secteur californien, les Amériques sont frangées, au long du Pacifique, par une subduction océanique continue, à laquelle s’ajoutent les subductions océaniques de l’arc des Antilles et de l’arc de la Scotia (ou des Sandwich du Sud). Si ces dernières appartiennent au type des arcs insulaires, si bien représenté dans l’ouest du Pacifique, les subductions de la façade occidentale des Amériques caractérisent, quant à elles, un type original, celui des cordillères, d’altitude élevée, et sans mers marginales associées. Sans qu’on puisse y voir a priori une relation de cause à effet, on notera cependant que l’activité des subductions de l’est du Pacifique a été beaucoup plus importante au cours du temps que celle des subductions de l’ouest du Pacifique. En face de l’Asie, la croûte océanique est d’âge secondaire: elle date du Jurassique supérieur (140 Ma) face au Japon, du Crétacé inférieur (plus de 100 Ma) face à l’Asie continentale. En face des Amériques, au contraire, il n’existe que des croûtes océaniques tertiaires, relativement anciennes face à l’Amérique du Sud, où elles datent de l’Éocène (60 Ma), plus récentes face à l’Amérique centrale, où elles datent du Miocène (12 Ma), d’âge subactuel au large du nord-ouest des États-Unis et du sud-ouest du Canada. La vitesse de subduction dans l’est du Pacifique, face aux cordillères, a été beaucoup plus grande que dans l’ouest du Pacifique: plusieurs milliers de kilomètres de croûte océanique ont été subductées sous les Amériques, alors que l’équivalent ne l’a pas été sous l’Asie.En ce qui concerne l’obduction et la collision , les Amériques représentent un modèle probablement moins riche que l’Ancien Monde, qui, avec les chaînes allant de Gibraltar à l’Indonésie, est particulièrement complet. Cependant, le domaine caraïbe en donne un bon exemple, souvent mal compris parce qu’il est aujourd’hui marin en grande partie, à l’instar du domaine méditerranéen, auquel on le compare à juste raison. Mais, à la fin du Jurassique (vers 140 Ma) puis vers le milieu du Crétacé (vers 100 Ma), des obductions et des collisions remarquables se sont produites qui mettaient en relation Amérique du Nord et Amérique du Sud. Après quoi les communications entre ces deux continents seront plusieurs fois établies sans que l’on puisse précisément faire la part de ce qui était collision continentale proprement dite et passage par des bretelles volcaniques émergées, dont l’Amérique centrale d’aujourd’hui donne l’exemple. Sur ce point, rien ne peut être dit avec certitude des Antilles australes qui entourent la mer de la Scotia, sauf que leurs structures, de nature comparable à celles des Antilles tropicales du domaine caraïbe, doivent relever de la même explication. Mais il est impossible, dans l’état actuel des connaissances, de fixer une chronologie aux éventuelles collisions qui ont pu survenir entre l’Amérique du Sud et l’Antarctique, si toutefois elles se sont produites.Le domaine caraïbe pose le problème particulier des communications entre la Téthys et le Pacifique , c’est-à-dire de l’existence éventuelle d’une circulation océanique latitudinale au niveau de la zone intertropicale. Pour des raisons géodynamiques générales confirmées par les données biogéographiques, il semble qu’il n’y ait pas eu de communication entre la Téthys et le Pacifique jusqu’à la fin du Jurassique, c’est-à-dire vers 140 millions d’années; un argument, parmi d’autres, en faveur de cette non-communication réside dans le fait que les Calpionelles – Protozoaires fossiles proches des Foraminifères – sont présentes dans toute la Téthys jusque sur la façade est du Mexique, mais toujours absentes sur la façade pacifique des Amériques. En revanche, il semble que la communication ait été établie à partir du Crétacé inférieur, ce qui permit la diffusion des faunes de la Téthys dans le Pacifique et vice versa. Cette diffusion s’est poursuivie jusqu’au milieu du Crétacé (100 Ma), moment où diverses collisions vont se produire dans la Téthys, tant dans le domaine caraïbe que dans l’Eurasie méridionale, désormais séparés par l’ouverture de l’Atlantique central. C’est peut-être à cette fermeture de la communication Téthys-Pacifique qu’est lié l’épisode anoxique (Mid-Cretaceous Event ) générateur des argiles noires du milieu du Crétacé, si communes dans l’Atlantique central et dans les chaînes alpines.En dépit d’une histoire complexe qui offrit des possibilités de communication entre l’Atlantique et le Pacifique, il ne semble pas qu’une véritable circulation latitudinale mondiale se soit rétablie par la suite, même si, à certaines époques, les barrières furent mineures, comme elles le sont aujourd’hui au niveau de l’Amérique centrale isthmique. L’évolution de l’Atlantique restera donc fondamentalement liée à son ouverture dans l’Arctique, vers la fin de l’Éocène (35 Ma).Les Amériques et les modèles d’orogenèsesLes Amériques fournissent donc des modèles d’orogenèses liées à la subduction, où elles sont exemplaires, et à l’obduction et à la collision, où elles apportent des compléments d’information. À cela s’ajoute la mise en évidence de puissantes translations longitudinales conduisant à des «collages» qui s’opposent aux «charriages» transversaux liés aux subductions et aux collisions.Le modèle orogénique lié à la subduction sur la façade occidentale des Amériques est la cordillère , qui se divise en cordillère proprement dite et en chaîne côtière (Coast Range) lorsque cette dernière est visible. Les traits fondamentaux du système cordillère-chaîne côtière sont la symétrie de structure (double déversement) et la dissymétrie de nature.Symétrie de structure en ceci que les cordillères proprement dites sont déversées et charriées vers les continents qui leur servent d’avant-pays – l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud, respectivement –, tandis que les chaînes côtières sont déversées vers le Pacifique; ainsi en est-il en Californie, mais aussi en Alaska et en Colombie, et, d’une certaine manière, en Amérique centrale. Le double déversement des systèmes montagneux, classique des collisions de l’Eurasie méridionale, notamment des chaînes méditerranéennes, n’est donc pas une spécialité de ces dernières.Dissymétrie de nature dans la mesure où les cordillères sont constituées de matériel continental emprunté à la marge des continents nord-américain et sud-américain, alors que les chaînes côtières sont constituées de matériel océanique emprunté au Pacifique et à ses dépendances. On trouve ainsi, liés à la subduction, d’un côté – dans les cordillères – l’ensemble des événements magmatiques qui se développent dans les marges continentales au-dessus des plans de subduction (globalement, le magmatisme calco-alcalin, caractérisé par les graniodiorites et par les rhyodacites), de l’autre côté – dans les chaînes côtières – les nappes ophiolitiques associées au métamorphisme de haute pression-basse température dans le faciès des schistes bleus. Cette opposition entre cordillère de marge continentale et chaîne côtière de marge océanique se retrouve également dans les chaînes de collision de l’Eurasie méridionale; la façade occidentale des Amériques permet de comprendre que l’origine de cette dissymétrie de nature n’est pas liée à la collision mais à la subduction.En ce qui concerne le modèle des chaînes de collision , c’est-à-dire des chaînes de type alpin, les Amériques n’apportent qu’une confirmation. On retrouve dans le domaine caraïbe des chaînes de type alpin avec nappes de charriage puissamment transportées vers et sur les marges continentales, avec un style tectonique allant de la surface à l’infrastructure. On ne trouve pas dans le domaine caraïbe la grande variété des processus de collision connus dans le reste de la Téthys, en Eurasie méridionale, notamment les processus d’hypercollision, caractéristiques des Alpes orientales ou, mieux encore, de l’Himalaya.Cette double exemplarité des Amériques à l’égard de la subduction et de la collision se retrouve très bien si l’on considère la position des ophiolites qui cernent l’Amérique du Nord (hors-texte, pl. XII): vers l’ouest, dans le Coast Range, les nappes ophiolitiques charriées vers le Pacifique passent sous la marge continentale nord-américaine (fig. 10); vers le sud, dans les Caraïbes, les nappes ophiolitiques sont charriées vers l’Amérique du Nord et reposent sur le continent nord-américain (fig. 13).Dans les chaînes de la façade occidentale des Amériques, le paléomagnétisme a récemment permis de mettre en évidence de très importants coulissages longitudinaux du sud vers le nord, crédités de translations de plusieurs milliers de kilomètres. L’attention avait été attirée sur ces possibles phénomènes par le système de faille de San Andreas, dont l’extrapolation dans le temps permettait de considérer qu’il représentait des translations de plusieurs centaines de kilomètres.Mais c’est à la détermination des paléolatitudes que l’on doit la conception de translations beaucoup plus vastes donnant des «collages» le long d’immenses décrochements mettant en contact des lanières dont les terrains se sont formés sous des latitudes très différentes. Le bilan n’est pas encore fait de l’importance réelle de ces phénomènes; en effet, de faibles erreurs dans l’attribution stratigraphique des terrains concernés conduisent à des conclusions très différentes: suivant que l’on se trouve dans une période de polarité analogue à celle de la période actuelle, ou de polarité inverse, une même observation paléomagnétique attribuera la formation des terrains à une zone située au sud de l’équateur ou au nord de celui-ci. Pour des terrains du Crétacé supérieur connus en Californie, cela revient à leur attribuer une origine soit au niveau du Pérou, soit au niveau du nord du Mexique. La différence de translation est considérable: plusieurs milliers de kilomètres dans un cas, quelques centaines de kilomètres seulement dans l’autre.Il n’en reste pas moins que ces observations justifient l’idée de translations longitudinales, d’autant plus faciles à comprendre que, jusqu’à il y a 40 millions d’années, l’ouverture du Pacifique se produisait non pas d’ouest en est, comme actuellement, mais du nord vers le sud (on distinguait alors une plaque de Kula, au sud, et une plaque de Farallon, au nord). Ce qui, par conséquent, a attiré l’attention sur la possible existence de mouvements longitudinaux dans le domaine téthysien, où ils avaient déjà été suspectés, mais probablement sous-estimés.Comparaison de l’ouest des Amériques avec l’ouest du Pacifique et avec le domaine téthysienLes structures de l’ouest des Amériques appellent des comparaisons avec celles de l’ouest du Pacifique, d’une part, et avec le domaine téthysien, d’autre part.Dans l’ouest du Pacifique, les archipels peuvent être considérés, en première approximation, comme des équivalents des chaînes côtières (Coast Ranges): on y rencontre des nappes ophiolitiques, du métamorphisme de haute pression-basse température et un déversement général des structures vers l’océan. Mais, le plus souvent, le domaine cordillérain manque, car, là où il commence de se développer avec son cortège de granodiorites et d’andésites, des mers marginales interrompent la continuité avec le continent. On n’a donc pas recherché sur celui-ci la trace des cordillères qu’on aurait pu attendre, bien qu’assez souvent celles-ci existent. Ainsi, au-delà de la mer du Japon, le système de nappes d’âge jurassique supérieur (140 Ma) du Japon avec ophiolites et métamorphisme de haute pression-basse température est corrélé avec des granodiorites qui se développent sur le continent asiatique jusque dans la région de Beijing. La naissance, toujours récente, des mers marginales de l’ouest du Pacifique masque, au moins partiellement, le dispositif orogénique lié à la subduction, dont on ne pense pas toujours à reconstituer la continuité (cf. infra ).La comparaison avec les chaînes alpines issues de la Téthys (y compris celles du domaine caraïbe; cf. supra ) permet de faire la part de l’originalité de la collision, plus réduite qu’on ne le pensait communément. Ainsi leur dissymétrie de nature avec granodiorites d’un côté et nappes ophiolitiques de l’autre – comme c’est par exemple le cas, d’une manière systématique, en Méditerranée – résulte-t-elle de subductions téthysiennes successives qui ont fait disparaître cet océan sous la marge eurasiatique pour l’essentiel, avant que les collisions des continents ne viennent ajouter leurs effets tectoniques grandioses à ces structures préliminaires: les équivalents des chaînes côtières ouest-américaines, avec leurs nappes ophiolitiques, furent ainsi charriés sur la marge des continents sud-téthysiens (Afrique, Arabie, Inde, Australie), tandis que s’accentuait le double déversement de l’ensemble.Différences et discontinuités des cordillères américainesLes cordillères américaines ne sont pas continûment identiques du nord au sud. Si on laisse de côté l’Amérique centrale et le domaine caraïbe, qui posent un problème particulier, évoqué précédemment, les différences ne portent pas sur les terrains qui les constituent – souvent de faciès étrangement comparables – mais sur leur situation tectonique présente.En Amérique du Sud, les structures originelles des cordillères charriées vers le continent sud-américain sont préservées, abstraction faite des jeux de failles – comme ceux du graben longitudinal de la vallée centrale du Chili, long de plusieurs milliers de kilomètres, ou des vallées du Cauca et de la Magdalena, en Colombie – et de la structure particulière de l’Altiplano, qui n’est pas encore très bien comprise (cf. infra ).En revanche, en Amérique du Nord, dans l’ouest des États-Unis et le nord-ouest du Mexique, ces structures originelles ont été reprises par une puissante extension horizontale créatrice du relief Basin and Range, si caractéristique du Nevada et de l’Arizona aux États-Unis (fig. 10) et du Chihuahua au Mexique. Cette extension a provoqué un élargissement considérable du système cordillérain, qui atteint 1 500 kilomètres, alors que la cordillère des Andes au niveau du coude d’Arica, où elle est le plus large, n’atteint que 600 kilomètres. Cette puissante extension et le relief qui lui correspond sont très originaux et n’ont pas d’équivalent dans le monde; on les attribue soit au fait que l’Amérique du Nord a subducté la ride est-pacifique entre le golfe de Californie et le cap Mendocino, en fonction de l’«avance tectonique» qu’elle a prise par rapport à l’Amérique du Sud, soit au développement d’un point chaud actuellement situé au niveau de Yellowstone et qui préparerait la séparation de la partie occidentale du continent nord-américain. Quoi qu’il en soit, le Basin and Range représente un exemple unique de système de failles extensif dans un continent; ni les fossés est-africains, qui paraissent annoncer une ouverture océanique de type atlantique (ou indien), ni les champs de failles de l’Asie centrale liés à l’hypercollision de l’Inde avec l’Eurasie ne lui sont comparables.De la sorte, les deux Amériques fournissent les deux modèles les plus originaux de croûte épaissie et de croûte amincie.La croûte épaissie est présente dans toute la cordillère des Andes, avec un maximum au niveau de l’Altiplano du Pérou et de Bolivie, où la croûte continentale atteint 70 kilomètres d’épaisseur. On attribue généralement cette épaisseur crustale à un phénomène de subduction continentale par lequel l’Amérique du Sud s’engage sous la cordillère au niveau du front des sierras subandines. Les Andes seraient donc comprises entre deux subductions d’importance inégale et de nature différente, subduction océanique du côté du Pacifique, subduction continentale du côté de l’Amérique du Sud (fig. 18). La première serait responsable des traits fondamentaux de la cordillère, la seconde de l’épaisseur de la croûte; ce dernier trait est remarquable à bien des égards, puisque, même dans l’Himalaya, la croûte continentale est plutôt moins épaisse.La croûte amincie est typique du Basin and Range, où son épaisseur est souvent inférieure à 30 kilomètres (fig. 10). C’est aux failles listriques, verticales en surface et se couchant progressivement à l’horizontale en profondeur, qu’est attribué cet amincissement qui correspond à des extensions dépassant 100 p. 100 pour beaucoup de chercheurs. Le Basin and Range est ainsi une région modèle qui fait l’objet de nombreuses études et qui fournit sans doute la clef de la naissance de certains bassins sédimentaires avec leurs réseaux de failles «enterrés».Si l’on examine plus attentivement les cordillères de l’ouest des Amériques, on s’aperçoit qu’elles sont segmentées, chaque segment étant séparé d’un autre par des zones d’accidents transversaux souvent très marqués, appelés linéaments en Amérique du Nord, transversales en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Les zones principales d’accidents transversaux sont (fig. 1): le linéament de Lewis and Clark (ou du Montana), entre cordillère canadienne et cordillère de l’ouest des États-Unis; le linéament du Texas, entre cette dernière et les Sierra Madre du Mexique; la transversale de Polochic-Motagua, entre l’Amérique du Nord et l’Amérique centrale, encore sismiquement active; la transversale de Barquisimeto, entre les chaînes caraïbes et la cordillère des Andes; la transversale de Huancabamba, entre les Andes septentrionales, à ophiolites, et les Andes centrales et méridionales, sans ophiolites; la transversale de Bariloche, entre ces dernières et les Andes australes, de nouveau à ophiolites et qui passent au domaine de la Scotia. Si les relations de cette segmentation avec la structure du Pacifique ne sont pas nettes en Amérique du Nord, elles le sont beaucoup plus en Amérique du Sud, où les transversales de Huancabamba et Bariloche encadrent à peu près l’actuelle plaque de Nazca et se situent à l’aplomb de la ride de Carnegie et de la ride du Chili méridional, respectivement.Dissymétrie des marges du PacifiqueSi l’on considère les deux côtés du Pacifique, on ne peut que noter la dissymétrie de cet océan, avec les cordillères en façade des Amériques, et les arcs insulaires en façade de l’Asie.En première approximation, cette opposition paraît liée à la différence des vitesses de subduction, rapides sous les Amériques, plus lentes sous l’Asie: plusieurs milliers de kilomètres de croûte océanique ont ainsi été subductés sous les Amériques alors qu’ils ne le sont pas encore sous l’Eurasie (cf. supra ); ce fait peut expliquer l’importance des structures compressives et la non-ouverture de mers marginales au long des Amériques.Mais cette explication n’est qu’une approche actuelle, car il n’en fut probablement pas ainsi dans le passé géologique. Tout d’abord, toutes les mers marginales de l’ouest du Pacifique sont récentes, la plupart d’âge néogène (moins de 20 Ma), quelques-unes d’âge paléogène (moins de 60 Ma); seule la mer de Tasman, entre Australie et Mélanésie, est d’âge crétacé tout à fait supérieur (70 Ma). On peut certes penser que les mers marginales actuelles ont été précédées par des mers marginales plus anciennes. Toutefois, à la fin du Jurassique (140 Ma), au parallèle de la Californie et du Japon, la dissymétrie est inverse: c’est à l’est que se trouve un système franciscain d’arcs insulaires et de mers marginales dont naîtra une chaîne côtière, tandis qu’à l’ouest les structures charriées vers le Pacifique avec ophiolites et métamorphisme de haute pression associé (du type fameux de Sanbagawa, au Japon, qui a donné le modèle de ce type de métamorphisme) se forment en position de chaîne côtière directement marginale par rapport au continent asiatique.Par conséquent, la dissymétrie actuelle du Pacifique n’est peut-être représentative que de l’époque présente, qui n’est qu’une étape dans une évolution où cordillères, chaînes côtières, arcs insulaires et mers marginales ont été associés successivement et/ou simultanément.L’origine du PacifiqueLes structures qui sont observées dans les cordillères ouest-américaines permettent de poser la question de l’origine du Pacifique. Si celle de l’Atlantique ne fait aucun doute en raison d’une ouverture océanique qui rompt la continuité des continents dont les structures se suivent de l’Ancien au Nouveau Monde, il n’en va pas de même du Pacifique, que l’on considère généralement comme antérieur à l’ère secondaire et directement issu de la Panthalassa, océan mondial unique qui s’opposait à la Pangée rassemblant les continents au Permien, il y a 280 millions d’années environ.Cependant, quelques faits troublent cette harmonieuse conception: le système paléozoïque chaîne du Cap-chaîne de la province de Buenos Aires-système de Cuyo (dans le nord-ouest de l’Argentine) atteint le Pacifique au niveau du Chili septentrional selon une incidence de 450 par rapport à la côte de cet océan qui recoupe ainsi les structures à la manière dont l’Atlantique recoupe celles de l’Ancien Monde. Il en est de même du système appalachien qui, par les monts Ouachita et les monts Marathon, à la frontière du Mexique, passe en tunnel sous les Sierra Madre et ressort à la côte pacifique perpendiculairement à celle-ci. Dans les deux cas, on peut penser que cette situation est due au fait que les structures de ces chaînes anciennes ont pu être coupées par les accidents longitudinaux générateurs des «collages» qui ont été révélés en Amérique du Nord par les données paléomagnétiques.Mais on peut aussi se poser la question d’une naissance de tout ou partie du Pacifique aux dépens d’un domaine continental – Pacifica – dont certains éléments aujourd’hui «collés» à la façade occidentale des Amériques pourraient avoir leur origine dans l’ouest du Pacifique: la présence de calcaires à Fusulinidés de la fin de l’ère primaire (Permien), de type téthysien, à la fois dans l’Amérique du Nord et dans l’extrême sud de l’Amérique du Sud (île Madre de Dios, au large du Chili méridional) alimente cette réflexion. Mais ce n’est qu’une question car, dans un espace pacifique déjà ouvert, hérité de la Panthalassa, des plateaux sous-marins, armés ou non de croûte continentale, auraient pu porter des sédiments qui, par leur latitude, eussent été comparables aux faciès téthysiens, sans pour autant qu’il y ait eu un continent.À l’égal de l’Ancien Monde, les Amériques sont donc riches de réflexions géodynamiques. Mais il reste que ce sont les cordillères, dont la cordillère des Andes est la plus spectaculaire, qui fournissent l’un des deux grands modèles géodynamiques d’explication de la formation des chaînes de montagnes, l’autre étant celui des chaînes alpines, dont l’Himalaya est l’accomplissement le plus impressionnant. On comprend qu’il s’agisse là des deux chaînes les plus élevées du monde, avec un avantage pour la cordillère des Andes si l’on veut bien considérer que, au droit du Chili septentrional, les 7 000 mètres de la cordillère s’ajoutent aux plus de 8 000 mètres de la fosse du Chili, en un dénivelé supérieur à 15 000 mètres, le plus grand du monde, presque deux fois celui de l’Himalaya.
Encyclopédie Universelle. 2012.